Barrage de Sivens : Zone humide à défendre




Dans la vallée du Tescou (Tarn), investisseurs privés et pouvoirs publics marchent main dans la main pour bétonner une splendide zone naturelle de plus. Des résidents et des agriculteurs du coin, rejoints par des militants et des militantes, s’organisent pour résister à ce grand projet inutile et doivent faire face à la répression étatique comme aux néonazis locaux.

La magnifique vallée du Tescou se trouve dans le Tarn à quelques encablures de la ville de Gaillac, célèbre pour son vin du même nom. Le territoire qui borde la rivière est constitué de 35 hectares de zone humide, forêt et bouilles. Pouvoirs publics (conseil général, pour partie propriétaire de ces terres et préfecture) et gros agriculteurs locaux ont décidé de réduire à néant cet endroit de quiétude où vivent de nombreux animaux sauvages dont une centaine d’espèces « protégées » parmi lesquelles cinq sont menacées. Un projet de barrage doit créer une retenue d’eau qui va noyer 18 hectares classés zone humide au profit une fois encore de l’agriculture industrielle.

Lois contournées ou ignorées

Ce projet est financé en grande partie par des fonds publics (environ 10 millions d’euros) servant l’intérêt privé d’une vingtaine de céréaliers et fermiers partisans de l’élevage intensif. Un certain nombre de lois ont été contournées voire ignorées, des dossiers plus que partiaux ont été présentés. Fiabilité, chiffres et rentabilité ont été gonflés pendant que dans le même temps des alternatives respectueuses de l’environnement étaient d’emblée écartées. Les politiciens locaux du conseil général ont applaudi ce projet des deux mains, sans consultation démocratique, obéissant ainsi à la logique de profit d’une agriculture dévastatrice pour l’environnement. Depuis déjà quelques années, un groupe de résidentes et résidents des environs, d’agriculteurs, de promeneurs habitués du lieu et de scientifiques naturalistes ont commencé à alerter du danger que pouvait entrainer ce projet destructeur de l’environnement, car cette zone du Testet est une des dernières zones humides du département non encore détruites. Tout ce petit monde entré en résistance a été renforcé par des militants et militantes des zones à défendre (ZAD) qui ont commencé à investir les lieux pacifiquement et à y établir un campement autogéré permanent. Entre 50 et 100 personnes occupent ainsi le terrain. Des tensions ont eu lieu pendant plusieurs mois. Les zadistes ont empêché à plusieurs reprises le déplacement d’espèces protégées et la venue des géomètres. La maréchaussée a été envoyée sur place, mais les zadistes lui ont tenu tête, reformulant leur dernier campement en « Gazad ». Cependant, début septembre, les choses se sont accélérées. Le conseil général a voulu en finir avec la contestation. Pendant que Ségolène Royal tergiverse, Valls agit. Il envoie gardes mobiles et GIPN déloger les récalcitrants perchés dans les arbres ou enterrés jusqu’à la tête, d’énormes machines et des bûcherons viennent ensuite commencer le dépeçage de la forêt. La violence policière est disproportionnée, les gardes mobiles sont deux fois plus nombreux, des éléments de la population locale sont venus soutenir les zadistes, les policiers gazent des ados déguisés en clowns, des personnes d’un certain âge sont molestées. Que dire pour les jeunes zadistes qui sont matraqué-e-s allègrement ?

Attaques de néonazis et de milices probarrage

Ces deux derniers week-end plus d’un millier de manifestants, à chaque fois, sont venus soutenir les zadistes. Un campement est organisé devant les grilles du conseil général du Tarn et des grévistes de la faim campent là. Lundi 15 septembre, les lycéens de Gaillac ont bloqué l’entrée de leur lycée. La police est venue les déloger mais la jeunesse gaillaquoise est en train de s’organiser. Dernières provocations en date, des néonazis d’Albi appellent au meurtre sur les réseaux sociaux des « hippies » du Testet et des milices probarrages s’organisent pour venir la nuit ratonner. La tension monte donc et cela rappelle une autre lutte plus médiatisée, celle de Notre-Dame-des-Landes. La logique y est la même : un grand projet inutile qui détruit une zone naturelle, pompant l’argent public au profit d’une minorité de profiteurs et de politiciens corrompus.

« bloquer ce projet jusqu’à son annulation »

Donnons pour finir la parole à cette poignée de militants et militantes entré-e-s en résistance : «  Dans tous les cas et dès maintenant, le collectif « Tant qu’il y aura des bouilles » appelle celles et ceux qui refusent ce monde à venir occuper, construire, reconstruire et habiter la zone pour bloquer ce projet jusqu’à son annulation ! Notre résistance est dynamique et créative, nous luttons contre un système, des idées et des pratiques, mais dans aucun cas contre des individus. Copains d’ici et d’ailleurs, ami-e-s bâtisseuses et bâtisseurs de nouveaux mondes, rejoignez-nous au plus vite ! Les courtes visites sont appréciées autant que les longs séjours ! Une victoire sur un grand projet nuisible est à notre portée ! »

Jean-Marc (AL Toulouse)

Pour en savoir plus : tantquilyauradesbouilles.wordpress.com

 
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