Centres de rétention : Les ratés de l’« ouverture à la concurrence »




Les associations indépendantes, relais avec l’extérieur et pivots de l’action juridique contre l’expulsion, sont attaquées par le gouvernement. La
mobilisation a imposé leur maintien dans les centres.

En 2008, 27 camps de rétention administrative ont enfermé en France
près de 40 000 personnes sans papiers, en attente d’expulsion. Depuis longtemps,la Cimade, association de solidarité avec les migrants, est présente dans les centres de rétention pour
apporter une aide juridique. Bien connue des réseaux de soutien, cette
structure est l’un des derniers recours des sans-papiers et de leurs soutiens face à l’expulsion et l’un des rares
témoins de la réalité dans ces camps.
Ce rôle particulier, autorisé par l’Etat,
de regard extérieur avait amené la
Cimade, ces dernières années, à alerter de plus en plus fortement sur les conséquences de la politique de chasse aux sans-papiers.

En août 2008, Brice Hortefeux décide de réformer les conditions de la
présence de la Cimade dans les centres de rétention. Il tente d’imposer une réforme qui vise à éclater la présence associative en plusieurs « lots géographiques » faisant l’objet d’un marché public pour l’attribution de subventions. Il en profite pour interdire toute
possibilité de témoignage sur la réalité des camps et modifier la mission
autorisée, qui passe d’une aide juridique à une simple information sur les droits.

Dès cette époque, le gouvernement
sollicite plusieurs structures totalement inféodées à l’Etat pour leur
financement afin de les pousser, en
échange de quelques largesses, à se
proposer « en concurrence » de la
Cimade. Développant dans les médias
un discours libéral sur la nécessaire
« fin d’un monopole », il s’agit alors
bien de choisir des « associations »
muettes et moins enclines à soutenir
juridiquement les sans-papiers.

CRÉATION DE SATELLITES DU GOUVERNEMENT

Au mois de novembre, après plusieurs semaines de mobilisation, le tribunal a donné une première fois raison à la Cimade. Qu’à cela ne tienne,
Eric Besson, fraîchement désigné
ministre, continue la réforme et désigne, en mai 2009, six associations
pour intervenir dans les centres. La
Cimade reste présente dans certains
centres, mais remplacée dans les autres par de véritables « opérateurs » au
service de l’Etat, dont la caricature est
symbolisée par un mystérieux « Collectif Respect » créé par des sbires de
l’UMP, qui se voit autorisé à intervenir dans les centres de rétention de
Guyane et de Guadeloupe.

Soutenue par un très large front
associatif et syndical, la mobilisation
s’est amplifiée et a donné lieu à de
nouveaux recours devant les tribu-
naux avec, au début du mois de juin,
une nouvelle victoire juridique qui
suspend pour l’instant la réforme.
Pour autant, le projet est loin d’être
enterré et l’offensive du gouverne-
ment contre toutes les associations
d’aide aux migrants, notamment par
le « délit de solidarité », va sans
doute continuer dans les mois et
années à venir. Le renforcement du
mouvement de solidarité se devra
d’être à la hauteur et de suivre la voie
des victoires récentes sur les centres
de rétention.

Marti (AL 93)

 
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