Chirurgie esthétique : Vagina designer




Même si la pratique n’est pas encore très répandue, il est de nos jours tout à fait possible pour des femmes de se faire refaire la vulve et le vagin à coups de scalpel. Cette recherche d’« esthétisme » ignore que les bénéfices et les risques, à la fois psychologiques et physiques, de ces pratiques sont à ce jour inconnus.

L’une des conséquences de l’absence patente d’éducation sexuelle de la population est l’étendue de l’ignorance des détails de l’anatomie génitale féminine. Celle-ci présente une diversité et une variabilité tout à fait normale, comme n’importe quel autre trait biologique (voir tableau).

Rajoutez à cela la peur de vieillir, et vous aurez un terrain parfait pour le développement du dernier avatar de la chirurgie esthétique : la chirurgie plastique vulvaire et vaginale.

Issue des États-Unis, sur lesquels nous sommes toujours en « retard », elle se développe depuis bientôt quinze ans en France. Une recherche sur Internet permet de facilement trouver une ou un chirurgien vendant ce type de service, généralement au prix fort. Les femmes demandeuses se présentent avec des photos de revues pornographiques pour expliquer le résultat qu’elles veulent – comme chez le coiffeur. Mais il n’est pas rare qu’elles viennent se faire opérer suite à des pressions de leurs partenaires qui n’apprécient pas l’apparence de leur sexe.

Rajeunir la vulve

L’épilation intégrale est un début, faisant ressembler les jeunes femmes à des jeunes filles prépubères. Mais pour les femmes moins jeunes, se raser ou s’épiler ne suffit pas pour retrouver le sexe de ses 14 ans. Dans ces cas-là, pour rajeunir et embellir, les techniques sont variées.
 La labioplastie, pour « retoucher » les lèvres, petites et grandes. Les petites lèvres peuvent être raccourcies, au laser ou chirurgicalement, et dans leur cas on utilise le mot de « nymphoplastie ». Les grandes sont rendues plus charnues par injection de graisse.
 La liposuccion du MontdeVénus pour en diminuer la proéminence.
 La circoncision du clitoris pour enlever le capuchon, qui serait disgracieux.
 La pigmentation de la vulve, plus claire ou plus foncée. Peut-être les praticiens proposent-ils un nuancier ?
 On peut aussi, à souhait, se faire faire une « hymenoplastie » : se faire recoudre l’hymen, et recouvrer ainsi sa virginité. Quel meilleur cadeau que d’offrir sa virginité à son amant... quand on a 50 ans ?

Améliorer le fonctionnement

Quand ce n’est pas l’aspect extérieur qui est en cause, c’est le fonctionnement intérieur auquel on touche. L’âge et l’accouchement feraient perdre au vagin son étroitesse. Il en découlerait une diminution du plaisir lors de la pénétration. Le plaisir de qui reste toutefois une question en suspens. Alors, dans ces cas un acte de chirurgie peut remédier à ce « naturel » état de fait.

Une autre technique pour accéder plus facilement au plaisir serait l’amplification du « point G ». On injecte dans la paroi antérieure du vagin de l’acide hyaluronique augmentant la taille du mythique « point G » et ce qui augmenterait l’intensité de l’orgasme féminin (s’il ne venait du clitoris).

Il est important de rappeler que, à notre connaissance, aucune de ces procédures n’a été soumise à des études sérieuses [1]. Il est donc impossible de savoir si ces « interventions augmentent la confiance en soi de nombreuses patientes » comme le vante le site d’un praticien. De même, il est tout à fait possible que le surcroît de plaisir constaté par les patientes ne soit que le résultat d’un effet placebo. Enfin, vu le caractère invasif de ces actes et l’innervation très dense des régions génitales, il serait pour le moins surprenant que ces opérations n’aient pas de conséquences « néfastes ». Pour les chirurgiens qui offrent leurs services, il semblerait que l’appât du gain ait pris le dessus sur le « d’abord, ne pas nuire » d’Hippocrate.

Chirurgie réparatrice

Par honnêteté, il faut rappeler que pour une minorité de femmes, des lèvres trop grandes peuvent représenter une gêne pour le port de certains vêtements, pour faire du vélo... Mais on notera l’ironie de l’oppression patriarcale : quand certaines font appel à la chirurgie pour se faire sciemment « mutiler », d’autres font appel à la même profession pour se faire « réparer » (avec une amélioration dans 75 % des cas [2]) le clitoris qui leur a été excisé contre leur gré.

La commission antipatriarcat

Étendue des mensurations des organes génitaux d’un groupe de 50 femmes.

Longueur du clitoris (mm) 5 – 35
Largeur du bouton clitoridien (mm) 3 – 10
Distance entre le clitoris et l’urètre (mm) 16 – 45
Longueur des grandes lèvres (cm) 7.0 - 12,0
Longueur des petites lèvres (mm) 20 – 100
Largeur des petites lèvres (mm) 7 – 50
Longueur du périnée (mm) 15 – 55
Profondeur du vagin (cm) 6,5 - 12,5

[11. J. Lloyd et al, « Female genital appearance : “normality” unfolds » ; BJOG : an International Journal of Obstetrics and Gynaecology, mai 2005 ; vol. 112 ; p. 643-646.

[22. P. Foldes et al, « Résultats de la réparation chirurgicale du clitoris après mutilation sexuelle, 453 cas », Gynécologie Obstétrique & Fertilité, 2006, vol. 34, pages 1137-1141.

 
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