Congrès de SUD-Education : 1996-2015... et après ?




La fédération SUD-Éducation s’est constituée en 1998, les premiers syndicats SUD-Éducation ayant eux vu le jour début 1996, dans la foulée du mouvement social de novembre-décembre 1995. Avec donc près de vingt années au compteur, où en est la construction de cette alternative syndicale dans l’éducation ?

Du 18 au 22 mai 2015, la Fédération des syndicats SUD-Éducation a tenu son VIIe congrès près de Brest. Le précédent s’était déroulé en mai 2012. En trois ans, c’est peu dire que la situation dans l’éducation a connu quelques soubresauts. De la réforme anti-égalitaire des rythmes scolaires à celle du collège en passant par les dégâts de la LRU 2, les équipes syndicales SUD-Éducation, de la maternelle à l’université, n’ont pas chômé.

Un congrès pour l’action ?

Et pourtant on ne peut que constater que ces questions n’ont pas réellement été l’objet du dernier congrès. En effet, les syndicats avaient décidé de se donner deux « thèmes » de débat : les conditions de travail et « une autre école ». Un texte d’orientation générale devait s’y ajouter. Placé en fin de congrès, il n’a pas pu être voté à Brest du fait d’un nombre important de textes et d’amendements (la logique étant celle de l’empilement sans réelle organisation d’un ordre du jour).

Mais la démarche questionne : le congrès doit-il être une sorte de « super-formation » sur des questions d’ordre général ou bien est-il un moment pour échanger sur les pratiques et les luttes syndicales ?

Un exemple de ces questions qui aurait peut-être méritées d’être plus et mieux traitées : en 2012, le précédent congrès fédéral avait validé la pertinence de cadres syndicaux unitaires pour engager l’action ; fin 2014, la bataille pour une autre réforme des rythmes scolaires dans le premier degré a vu se dessiner une intersyndicale restreinte CGT-FO-SUD qui a été en mesure de peser sur le principal syndicat du premier degré, le SnuiPP-FSU. À la fois ça n’a pas été suffisant pour assurer la victoire, et en même temps c’était une nécessité pour construire une grève dont ne voulaient pas les syndicats majoritaires.

N’aurait-il pas été pertinent – à partir de cet exemple et/ou d’autres – de mener une analyse approfondie sur les dynamiques unitaires dans le secteur ? De même l’analyse des évolutions syndicales (avec la poussée de FO et du Snalc dans l’éducation nationale) est pour l’instant restée hors champ.

Des questions cruciales en suspens

Finalement, il semble bien que la question du sens et de l’utilité d’une fédération de syndicats soit l’un des véritables angles morts dans SUD-Éducation. Où en sommes-nous près de vingt ans après la fondation des premiers syndicats SUD-Éducation ? Depuis près de dix ans, le nombre des adhésions oscille entre 4.500 et 5.000. Sachant que le secteur professionnel compte 1.500.000 salarié-e-s, il y aurait pourtant matière à s’interroger.

La réalité des syndicats est très variée : rares sont les syndicats départementaux à dépasser les 100 adhérents (mais il reste des syndicats académiques qui bien sûr organisent plusieurs centaines de membres), ce qui implique des équipes militantes réduites. Autre questionnement : où en sommes-nous de la syndicalisation des personnels extra-enseignants ? Chez les administratifs, les personnels de santé, etc., SUD est très peu représenté.

Alors que justement SUD a perdu sa représentativité dans l’éducation nationale aux dernières élections professionnelles, il n’y avait, là encore, pas de place lors de ce congrès pour revenir de manière approfondie sur cette situation nouvelle et sur ses conséquences.

A contrario, lors de ce congrès, une motion sur le supérieur (où pour le coup SUD a gagné récemment sa représentativité) a posé une question essentielle : comment s’organiser pour développer la syndicalisation. N’est-ce pas, justement, une question qu’il s’agirait de décliner à tous les niveaux de la fédération ? Non pas pour gagner des « parts de marchés » mais bien pour élargir une base syndicale acquise à l’auto-organisation des luttes et au syndicalisme de transformation sociale.

Articuler stratégie et développement syndical

Cela renvoie au projet initial de SUD-Éducation. En 1998, le congrès de fondation affirmait ceci : « L’objectif d’un “autre syndicalisme” est de ne pas se figer dans des combats formels, mais bien d’être un outil au service des luttes sociales pour qu’elles aboutissent à une véritable transformation des rapports sociaux. » C’était se situer, d’une certaine manière, dans la continuité d’un syndicalisme révolutionnaire qui a conçu l’action syndicale, non pas comme la somme des intérêts particuliers, mais bien comme la matérialisation d’une unité de classe.

S’agit-il de construire SUD-Éducation dans tel ou tel département, dans telle ou telle université, sans imaginer des campagnes communes, sans échanger sur les pratiques, sans se donner des perspectives de développement à l’échelle entière du champ de syndicalisation qu’est censé couvrir le syndicat ? « L’autonomie des syndicats » n’étant sans doute pas contradictoire avec cela.

De la même manière, le syndicalisme révolutionnaire promouvait la structuration horizontale des syndiqué-e-s au sein des unions locales interprofessionnelles. Là aussi, bien des questions sont en jachère : comment intégrer l’interprofessionnel à notre syndicalisme, et ce au quotidien ? La construction de l’Union syndicale Solidaires ne se fait pas « à côté » de SUD-Éducation : c’est bien un même projet.

Des enjeux se dessinent pourtant aujourd’hui : sur l’autonomie du mouvement social, sur la façon d’affronter l’État et le patronat… Défendre un syndicalisme de contre-pouvoir n’est ce pas tout à la fois le faire vivre dans son champ professionnel mais aussi auprès de l’ensemble des exploité-e-s ?

Espérons que les trois prochaines années permettront de poser ces débats de fond, afin que l’alternative syndicale reprenne des couleurs dans l’éducation comme ailleurs.

Des communistes libertaires
de SUD-Éducation


DU CÔTÉ DU RENOUVELLEMENT

Vingt ans déjà… et une nouvelle génération
de militants de SUD-Éducation au rendez-vous parmi les 200 délégué-e-s des syndicats. Avec 8%
des délégué-e-s issus du Sgen (ils et elles l’avaient rejoint du temps de
la CFDT de l’autogestion), nombreuses et nombreux sont les militant-e-s à faire leurs premiers pas
en syndicalisme chez SUD (même si 5% viennent
de SUD-Étudiant).

La moitié étaient des femmes… ce qui n’est pas encore assez représentatif d’un milieu professionnel féminisé à plus de 70% !

 
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