Édito : Sécuritaire, racisme d’État, précarisation : pour une révolte globale




Été 2005, Sarkozy multiplie les expulsions d’immigré(e)s dans les taudis parisiens et sa police organise une série de rafles de sans-papiers dans les quartiers Est de la capitale. Si les expulsions suscitent l’indignation dans les réseaux militants et bien au-delà, les rafles se déroulent dans une indifférence généralisée.

Eté 2006, Sarkozy entend une nouvelle fois attirer l’attention médiatique sur sa personne et fait vider le plus grand squatt de France à Cachan, occupant ainsi la une des tabloïds. La discrétion est en revanche de rigueur pour les rafles qui se poursuivent dans les XIXe et XXe arrondissements de Paris…

L’histoire semble se répéter implacablement. Le gouvernement se livre en toute liberté à une violation répétée et constante des droits humains en s’en prenant à la catégorie la plus précaridée et la plus exploitée de la population sans rencontrer d’obstacles majeurs dans les institutions comme dans la population.

La droite est en campagne et entend rassurer son électorat après le traumatisme de sa défaite face à la rue pour imposer le Contrat première embauche et suite à son obligation d’accepter une régularisation partielle des élèves sans-papiers et de leurs familles sous la pression politique. Et c’est une fois de plus par sa politique sécuritaire et anti-immigré(e)s que le candidat à l’élection présidentielle entend asseoir son pouvoir et mesurer sa popularité.

Au-delà des gesticulations médiatiques du premier flic de France, la politique de la droite est marquée par un nouveau durcissement qui se traduit par l’application d’une partie essentielle du programme du Front national. L’avancée de l’idéologie frontiste se mesure aussi bien dans le contenu des lois (loi réformant le Code sur l’entrée, le séjour des étrangers et le droit d’asile, projet de loi sur la prévention de la délinquance discuté en septembre et octobre au parlement), mais aussi sur des notions racistes telle “ l’attachement à la France ” qui inspire toute la politique administrative actuelle (circulaire du 13 juin 2006 sur les élèves sans papiers et leurs familles) à l’égard des étrangers “ illégaux ”.

La droite espère toucher les dividendes de cette politique inspirée par une idéologie fasciste et raciste, mais une fois de plus, elle pourrait conforter l’électorat frontiste dans ses choix et élargir les assises du vote lepéniste en faisant prévaloir l’idée que “ l’original vaut mieux que la copie ” et surtout qu’il est démontré que le vote FN est un vote utile, puisqu’il permet concrètement aux idées racistes et sécuritaires de progresser politiquement.

Le collectif national Uni(e)s contre une immigration jetable, allié sur le terrain au Réseau éducation sans frontières (RESF), a parfaitement compris l’enjeu de la situation politique actuelle. C’est pourquoi il travaille à l’organisation d’assises nationales (en octobre) et d’états généraux de l’immigration (en janvier 2007). Le but de ces deux moments d’élaboration politique est de doter le mouvement antiraciste d’un contre-discours politique global permettant de combattre une idéologie où le racisme se mêle de plus en plus étroitement au sécuritaire en dévoilant les mécanismes (précarisation, exploitation, oppression de genre, oppression culturelle…) sur lesquels elle s’appuie pour s’imposer, mais aussi de réfléchir à des alternatives à la politique actuelle d’accueil.

Cette démarche tranche avec une approche humanitaire, toujours aussi prégnante dans les mobilisations, qui s’insurge contre les aspects les plus révoltants des politiques racistes et sécuritaires tout en préférant ignorer ses fondements politiques. En dépit d’une médiatisation qui entend d’abord émouvoir sur le fait que des enfants puissent faire l’objet d’une répression policière, RESF s’emploie à l’échelle locale comme nationale à faire le lien entre une situation humaine inacceptable et une politique plus globale qui en est la cause, en dénonçant les lois racistes et en appelant publiquement à la désobéissance.

Contestation globale d’une oppression qui fait système, désobéissance, recherche d’alternatives, autant de démarches qui se rapprochent de celles des courants critiques en général et du courant libertaire en particulier. Raison de plus pour s’y inscrire résolument et faire entendre nos réflexions et notre projet de société.

Alternative libertaire, le 26 août 2006

 
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