États-Unis : Le hard discount est un fléau social




En février nous avons publié deux articles sur le cas Wal-Mart aux États-Unis, la stratégie de boycott et les luttes des caissières contre cette chaîne de supermarchés. Nous revenons ce mois-ci sur la façon dont le hard discount peut appauvrir une population.

Le patronat français des hypermarchés, Leclerc en tête, a ces derniers mois fait campagne pour une déréglementation accrue de la grande distribution, au motif qu’ainsi il pourrait baisser les prix, au bénéfice de la clientèle.

L’exemple de l’américain Wal-Mart – que ses concurrents français ne peuvent ignorer puisqu’il est n°1 mondial – montre en quoi la baisse forcenée des prix ne résout nullement la pauvreté, et peut même l’aggraver. Son modèle économique repose en effet sur la pauvreté des travailleurs et des consommateurs. C’est une sorte d’« antifordisme », au sens où Ford payait ses ouvrières et ses ouvriers un bon salaire pour qu’ils achètent des voitures Ford, tandis que Wal-Mart tire au maximum les prix vers le bas pour reproduire sa clientèle de working poors travailleurs pauvres »). Ses offres spéciales sont d’ailleurs publiées le jour où les chèques de l’aide sociale arrivent dans les foyers.

Paupérisation des régions

La Réserve fédérale a déclaré que les prix imbattables de Wal-Mart étaient « la meilleure chose qui soit jamais arrivée aux classes populaires ». Diverses études prouvent le contraire.

Même la Chambres des représentants, dans un rapport de 2004, a évoqué le « prix secret » que la société payait pour Wal-Mart, qui s’enrichit en grande partie grâce au made in China. En 2004 la marque pesait, à elle seule, 12 % des importations chinoises aux États-Unis, contribuant à hauteur de 20 % au déficit commercial national.Quand un de ses hypermarchés s’implante dans une zone défavorisée – souvent avec des avantages fiscaux – c’est le cercle vicieux : les petits commerces ferment, le niveau de vie baisse, l’emploi chute dans d’autres secteurs, les recettes fiscales baissent, les services publics sont réduits… C’est ainsi qu’est apparu le terme de walmartisation pour désigner la paupérisation d’une région dans ces conditions.

Une étude portant sur la période 1987-1999 a montré que plus un État comptait d’hypermarchés Wal-Mart plus son taux de pauvreté augmentait, tandis que les diverses subventions et aides fiscales coûteront aux contribuables près de 10 milliards de dollars sur les cinq années à venir.

Wal-Mart ne garantit une assurance-santé qu’à la moitié des 1,3 million de salarié-e-s qui, pour être embauché, sont contraints de passer une visite médicale. L’autre moitié pèse sur les budgets sociaux des États. En Californie, Wal-Mart fournit à ses working poors un guide d’accès aux dispensaires de santé, et des bons d’achat de nourriture.

Le dernier slogan de Wal-Mart, « Faire des économies et vivre mieux », est aussi puant que ceux de Leclerc détournant Mai 68 : « Il est interdit d’interdire de vendre moins cher ! », « Leclerc défend votre pouvoir d’achat » ou « La hausse des prix oppresse votre pouvoir d’achat ».

Yvonne (AL93)

Courrier

Un lecteur défend le boycott

Thierry G. (de Cannes) a souhaité répondre aux camarades de la Nefac-Montréal qui, dans le numéro de février d’Alternative libertaire, avaient critiqué la stratégie de boycott et de consommation éthique.

« La stratégie du boycott ne prend pas naissance dans le courant réformiste d’“une certaine gauche” […]. Des associations depuis plus de quarante ans militent et agissent. Des cahiers des charges ont été mis au point dans les années 1960 pour respecter un mode de fonctionnement et surtout combattre le capitalisme […]. Cahiers des charges pour une agriculture plus propre (biologique) mais surtout et avant tout, pour une gestion complète, un respect de la nature et des travailleurs. […] Nos actions sont bien des actions intégrées à une stratégie globale, axée sur la lutte des classes et le maintien d’une vie honorable […]. »

 
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