Formation professionnelle : Qu’importe le flacon pourvu qu’on ait l’ivresse !




Le 20 septembre 2003, un accord national interprofessionnel sur la formation professionnelle a été signé unanimement par les cinq confédérations syndicales reconnues représentatives par le gouvernement. La signature de la confédération CGT a éclipsé le contenu même de cet accord. Les éditorialistes et autres consultants « spécialistes » du syndicalisme ont pour la plupart milité pour la signature de la CGT.

On sait que la direction de la CGT est sans projet propre, et qu’elle a une très nette tendance à prendre comme boussole la position de « l’opinion » à son égard. Et, quand Hervé Nathan dans Libération, quelques jours avant la réunion du comité confédéral de la CGT, stigmatise par avance, celles et ceux qui s’opposeraient à la signature, la messe est dite. Refuser le projet d’accord revient à être assimilé aux « partisans du tout ou rien ». Le service public de l’audiovisuel se contentera de l’information sensationnelle de la signature de la CGT. Comme d’habitude, il n’y aura aucun débat contradictoire sur le contenu de l’accord. Le ministre Fillon, lui non plus, ne s’est pas économisé : « La question de l’évolution de la CGT et de sa capacité à participer à l’élaboration du droit social en signant des accords se pose. »

Pour le quotidien patronal Liaisons Sociales : « La CGT était attendue sur sa capacité à sortir son stylo pour signer. » Il fallait que la CGT signe, elle a donc signé. Dans Libération, toujours, la signature décidée par la direction de la CGT est commentée par Cambadelis du PS, délivrant un bon point de la social-démocratie !

La direction de la CGT tente de présenter l’accord comme une victoire arrachée sur le MEDEF opposé aux accords normatifs et qui revendique la primauté des accords d’entreprise contre les accords de branche. C’est oublier un peu vite que la direction du patronat avait envie de reprendre la main au niveau de la négociation contractuelle au moment où c’est le gouvernement qui mène la danse.

Car il faut bien le dire, c’est le patron qui décide et non le salarié qui aurait une envie particulière de formation. C’est également une formation financée pour une large part par le salarié lui-même sur son temps libre (l’indemnité sera de 50 % du traitement net, sans cotisations sociales pour les patrons avec les conséquences prévisibles pour les droits à la retraite, au chômage, etc.). L’augmentation de la participation des entreprises, actuellement de 1,5 % de la masse salariale, passera en 2006 à 1,6% ! + 0,1% !!

Et le patronat obtient la mise en place d’un contrat de professionnalisation se substituant aux divers contrats en alternance intéressant à la fois les jeunes, mais aussi les femmes après un congé maternité, les travailleurs handicapés et les salarié(e)s de plus de 20 ans d’activité ou de plus de 45 ans.

Ce nouveau dispositif renforce la précarité déjà bien en œuvre pour les jeunes (pas de salaires au niveau des minima conventionnels) et permettra aux salarié(e)s plus ancien(ne)s de se voir attribuer une nouvelle classification selon « des modalités de prise en compte des efforts accomplis par le salarié » !!

Comme l’écrivait Maryse Dumas, secrétaire confédérale de la CGT dans le cadre de la consultation interne à la CGT : « L’effort est déséquilibré entre les employeurs et les salariés ». Comment peut-on signer l’accord après cela ?

Ce n’est pas cet accord qui permettra de faire progresser le droit des salarié(e)s à une véritable formation professionnelle.

Alors l’analyse du contenu de l’accord méritait mieux qu’une mise en scène de la signature de la CGT rejoignant le « syndicalisme réformiste ».

Thierry Aureliano (AL Transcom)

 
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