Écologie

Green bans : quand les maçons disent non, c’est non !




Les Green Bans, c’est une histoire inspirante de lutte syndicale en convergence avec l’écologie. Mais pas seulement ! Dans les années 1970 en Australie, les ouvriers et ouvrières syndiquées du BTP revendiquent de choisir les finalités de leur travail.

À première vue, il peut sembler incroyable que des travailleurs du BTP aient pu être en première ligne des luttes écologiques. Source importante d’enrichissement de la bourgeoisie, ce secteur représente actuellement en France 43 % des consommations énergétiques et génère 23 % des émissions de gaz à effets de serre [1]. C’est un véritable colosse de la dégradation environnementale. Mais dans les années 1970 en Australie, les membres du New South Wales Builders Labourers Federation, un syndicat du secteur de la construction, étaient de véritables pionniers d’une nouvelle forme de lutte écologique.

Menés notamment par Jack Mundey, membre du Parti communiste d’Australie, ces travailleurs syndiqués proclament en mai 1970 une forme nouvelle de lutte basée sur la responsabilité sociale collective. Ils revendiquent le droit de refuser que leur travail serve à des fins néfastes [2].

Notre travail, nos objectifs

Ainsi, forte de ses 30 000 membres, 90 % des salariés du BTP de Nouvelles Galles du Sud, la Builders Labourers Federation (BLF) utilise la puissance du nombre pour imposer la fin de la construction de projets inutiles et encourager celle de bâtiments bénéfiques  : des hôpitaux, des écoles, etc.

Mais l’importance stratégique de ce nouveau type de lutte syndicale se manifeste lorsqu’il permet à la BLF de répondre aux demandes des victimes de développeurs et promoteurs peu scrupuleux. La première intervention a lieu dans le Victoria alors que des investisseurs envisagent de transformer le parc d’un quartier populaire de Melbourne en une fabrique Kleenex  [3].

Des centaines de riveraines et de riverains protestent pour défendre leur quartier et mettre fin à ce projet visant à bétonner et privatiser un peu plus la ville. Ce n’est que lorsque les travailleurs syndiqués de la BLF refusent de participer au chantier que le projet est définitivement annulé, marquant le début des luttes que l’on connaît aujourd’hui sous le nom de Green Bans, les «  interdictions vertes  ».

Au fil de la décennie, de nombreux projets immobiliers et d’infrastructures sont ainsi combattus avec succès. C’est le cas d’un projet d’autoroute menaçant d’expulsion près de 80 000 personnes dans une banlieue populaire de Sydney ou encore celui de la lutte pour le parc Kellys Bush menée par un collectif de femmes.

Ces luttes se font aussi au nom de la défense des terres appartenant à des populations aborigènes. Parfois même, elles permettent de défendre les droits homosexuels, lorsque des travailleurs syndiqués suspendent leurs travaux à l’université de Macquarie afin que l’ordre d’expulsion prononcé contre le militant gay Jeremy Fisher soit révoqué  : le premier Pink Ban de l’histoire  [4] !

Un héritage de lutte inspirant et qui donne à réfléchir alors qu’en France seulement 4 % des travailleuses et travailleurs du BTP sont syndiquées !

Niels (UCL Montreuil)

[1Source : ministère de l’Écologie, 2020.

[2« Green bans movement  », à lire en anglais sur dictionaryofsydney.org.

[3« Remembering Australia’s Green Bans  », tribunemag.co.uk

[4Idem.

 
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