Guet-apens : Déguisé en CPE pour arrêter des sans papiers




Quand la police essaie de remplacer celles et ceux qui éduquent, on est généralement méfiant. Et pour cause, dans l’histoire qui suit, un policier se fait passer pour un CPE de collège, pour arrêter une famille sans papiers.

Dans un collège en zone d’éducation prioritaire du XVIIIe arrondissement de Paris, un mercredi de septembre, des parents d’élève se présentent à un rendez-vous fixé par téléphone par le conseiller principal d’éducation (CPE) de leur enfant. Mais il s’avère que personne au collège ne les a convoqués… Le couple repart, quand des policiers débarquent et leur passent les menottes, direction le commissariat. Pris de court, le CPE assiste impuissant et choqué à l’arrestation. Réponse immédiate d’un des policiers : l’appel téléphonique et le pseudo rendez-vous avec le CPE a servi d’investigation !

Ici, il ne s’agit pas de s’interroger sur le bien-fondé de cette arrestation (d’autant qu’après vérification, il ne s’agissait pas d’une famille sans-papiers), mais sur l’impact de telles méthodes sur les pratiques dans l’éducation et de dénoncer l’extension du pouvoir policier.
Il est évident que de ces procédés entachent les fonctions des professionnel-le-s de l’école et c’est sur ce point que nous nous sommes indigné-e-s en tant qu’enseignante et CPE.

On sait l’importance de l’implication des parents dans la scolarité de leur enfant. Et pourtant entre reconnaissance et hostilité, entre confiance et résistance, les rapports famille-école sont ambigus. Et oui, la confiance, ça ne se décrète pas... Ils accordent du temps à cette relation qui repose sur l’écoute et l’appui et permet une requalification des parents et une revalorisation des élèves.

Avec un tel épisode c’est tout ce partenariat éducatif avec les parents, construit dans un esprit de confiance réciproque qui se voit démoli.
On dénonce aussi cette intervention comme digne des méthodes employées sous Vichy. Ces parents ont véritablement été attirés dans un guet-apens. Durant l’année, la police a déjà démontré qu’elle n’hésite pas à appliquer des procédés peu éthiques et souvent révoltants afin d’arriver à ses fins (on se souvient du grand-père sans-papiers, interpellé alors qu’il venait chercher son petit-fils !).

Un nouveau Seuil

Bien que l’on ne soit pas dupe quant aux méthodes employées par la police, il semble qu’ici un seuil ait encore été franchi. Ces manœuvres douteuses posent un sérieux problème de déontologie. Cet acte devrait être punissable par la loi. Pourtant rien n’est moins sûr. La loi est très claire en ce qui concerne l’usurpation d’un « titre attaché à une profession réglementée par l’autorité publique [1]  » : la peine encourue est d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. Mais bien que la principale de l’établissement en ait avisé le rectorat, quelques inquiétudes subsistent quant aux débouchés. En effet, le code pénal ne parle pas spécifiquement de l’usurpation d’identité et de fonction quand l’auteur des faits appartient à la police !

Au final, face à une situation qui tend à se dégrader, il est urgent de se révolter et d’agir, même si l’on est souvent écartelé entre notre action militante et notre statut de fonctionnaire de l’État…

Mélanie et Julie (AL Paris Nord-Est)

[11. Ordonnance n° 2000-916 du 19 septembre 2000 art.3. Journal Officiel du 22 septembre 2000 en vigueur le 1er janvier 2002.

 
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