nécrologie

Hasta siempre, Agustin Gomez Acosta !




Dimanche 13 octobre au soir, la nouvelle tombait. Agustin Gomez, dit Agus, la soixantaine, jeune retraité de l’enseignement, militant anarcho-syndicaliste de la CGT espagnole, était terrassé par une attaque cérébrale foudroyante. Nouvelle terrible pour ceux et celles qui l’ont connu, l’ont apprécié, l’ont aimé. En premier lieu sa compagne, Milouda.

Agustin faisait partie des militant-e-s « historiques » de la CGT espagnole. Il avait connu la scission avec la CNT à la fin des années 70, et avait été un des artisans de la construction de la CGT en Andalousie.

Comme beaucoup de militant-e-s de cette génération, il aimait me répéter, revenant sur son parcours : « Le projet CGT est imparfait, le chemin pris est peut être quelque peu différent de celui que l’on s’était fixé à l’origine. Nous sommes néanmoins fier-e-s de ce que nous avons construit. »

Une lucidité critique : quoique empreint de contradictions et de lacunes, naturelles quand l’on construit un projet syndical de masse et que l’on articule celui-ci avec une idéologie et une pratique aussi exigeantes que l’anarcho-syndicalisme, le poids de la CGT est réel. Forte de ses 90.000 membres, la CGT espagnole est la seule organisation se réclamant des idéaux libertaires à peser de façon incontestable dans la lutte de classe.

Antimilitariste, syndicaliste et internationaliste

Antimilitariste convaincu, Agustin fut insoumis au service. Dans les années 80, il fut de toutes les manifestations menées en terre andalouse contre les bases américaines et celles de l’OTAN 

Il participa également à toutes les batailles syndicales depuis la fin du franquisme jusqu’à l’Espagne en crise d’aujourd’hui. Secrétaire un temps de la CGT Cadiz et de la CGT andalouse, il prit part au 15M et au mouvement des Indignad@s ; tout comme, quelques années auparavant aux marches internationales contre le chômage et la précarité.

Pour nous, militant-e-s libertaires ou syndicaux, c’est néanmoins son inlassable travail international qui nous l’a fait connaître et apprécier.

Membre du secrétariat international de la CGT, Agus y anima avec constance la Commission « Afrique du Nord-Maghreb ». Il fut aussi un des principaux animateurs du Réseau syndical euro-méditerranéen .

Au Maroc, Agustin était connu à l’extrême gauche et dans le monde associatif et syndical, mais aussi des autorités, tant sa hargne était grande pour dénoncer l’injustice et la brutalité du système politique monarchique : le Makhzen. Il fera tout, aussi, pour y planter la graine rouge et noir et contribuer à faire émerger dans ce pays une amorce de mouvement libertaire.

D’Agus, je retiendrai deux moments qu’il m’a été donné de partager avec lui.

Été 2008, dans les environs de Beni Mellal, une nuit passée chez un camarade, Mourad, dans une maison en ruine avec pour seul confort des paillasses au sol faisant office de lit, tant cet ami vivait dans le dénuement. Une nuit passée à refaire le monde, les yeux rivés vers le ciel étoilé de la campagne marocaine...

Été 2009, nous organisions une délégation CGT-CNT à Khouribga, en soutien aux mineurs en lutte de l’OCP. Nous venions apporter, en mains propres, l’équivalent de 3000 euros, fruit d’une souscription que nous avions lancée dans nos organisations respectives.

Souvent têtu et capable de coups de gueule redoutables, que seule sa compagne Milouda était capable d’apaiser, Agus était un passionné. Un passionné de la révolte. Un passionné de la vie. Un passionné aussi de la liberté. Un Homme plein de gentillesse et de générosité.

La lucha sigue !

Jérémie Berthuin (AL Gard)

 
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