Hôpital d’Uzès : Contre des économies de malade




Depuis six mois, le personnel du centre hospitalier le Mas Careiron, à Uzès, dans le Gard, s’est mobilisé à l’appel de l’intersyndicale SUD – CGT – FO – USP (Union Syndicale de la Psychiatrie) contre la mise en place d’un plan d’économie que le directeur de l’établissement a tenté d’imposer.

L’hôpital le Mas Careiron, qui
emploie 600 salarié-e-s, est spécialisé
en psychiatrie et présente
un déficit de 750 000 euros qui a
été organisé depuis plusieurs
années par l’Agence régionale de
santé (ARS) à travers des coupes
budgétaires expérimentales
(modulation de la Dotation
annuelle de fonctionnement).

UN DÉFICIT CRÉÉ DE TOUTE PIÈCE...

Le nouveau directeur a immédiatement
voulu imposer ses
solutions toutes trouvées : suppression
de 11 jours de repos
compensateurs, suppression de
dépenses de confort pour les
patients (croissant du dimanche,
bouteilles d’eau, projet de mutualisation
de services avec l’hôpital
local (cuisines, administration,
jardins, etc.). Tout ceci pour
déboucher sur des dizaines de
suppressions d’emplois. Droit
dans ses bottes, le directeur qui
refusait de négocier, cherchait à
diviser le personnel en comptant
sur la période d’élections professionnelles
(qui a vu Sud rester le
syndicat majoritaire) pour cliver
les organisations syndicales, ce
qui n’a pas du tout marché. Il a
aussi tenté avec plus ou moins
de succès de cliver et de désolidariser
une partie du personnel
médical du reste des salarié-e-s
en leur promettant des
financements pour certains
« nouveaux projets » grâce au
dégraissage.

La détermination et l’unité du
personnel et de ses organisations
syndicales a mis à mal les desseins
du directeur. C’est par une
action directe, démocratiquement
décidée et forte que le personnel
s’est fait entendre.

LA RÉPONSE DES SALARIÉ-E-S : UNITÉ, DÉMOCRATIE, INVENTIVITÉ

Le 8 octobre 2014 a eu lieu une
action de grève décidée en
assemblée générale (AG). Fortement
suivie, elle a débouché sur
l’envahissement, bruyant et
déterminé, des locaux de l’administration.
Entre 200 à 300 salariée-
s étaient présents malgré la
limitation du droit de grève à
l’hôpital par des assignations.
Cela a permis d’ouvrir une brèche
dans le mur du mépris que le
directeur nous opposait. Avec le
représentant de l’ARS, il a dû faire
face à la colère du personnel. Il
a dû reculer immédiatement sur
les économies faites au détriment
des patients et acter par écrit qu’il
suspendait son plan d’économie
en l’attente de négociations, après
une rencontre de l’intersyndicale
avec l’ARS.

Le personnel a aussi décidé en
AG d’une grève du zèle (arrêt des
saisies d’actes sur l’informatique,
retour au dossier patient papier et
arrêt des transmissions par informatique,
limitation maximale des
dépassements d’horaires effectués
par le personnel dans le cadre
du service, …). Pour compléter
son action, le personnel a décidé
d’une collecte de fonds pour une
démarche juridique collective
avec un avocat pour l’ensemble
du personnel. Il est aussi décidé
de se mettre en lien avec la
convergence des hôpitaux en lutte,
de lancer une pétition de soutien
en direction de la population
et d’envoyer une adresse aux
unions départementales des syndicats
pour les appeler à soutenir
lors des prochaines actions.

La réunion avec l’ARS et le
directeur ne venant pas (ceux-ci
faisant le mort), le directeur
manoeuvrant en coulisse pour
avancer son plan, le personnel
s’est mobilisé devant l’antenne
nîmoise de l’ARS et a fini par
obtenir, après avoir coupé la route
et s’être fait entendre avec les
tripes, qu’une délégation soit
reçue.

COMITÉ D’ACCUEIL

Il a été obtenu que l’ARS
conseille au directeur de retirer
son projet de l’ordre du jour du
conseil de surveillance (anciennement
conseil d’administration)
et d’ouvrir des négociations. Le
directeur du conseil de surveillance,
élu local au conseil
général du Gard, a promis sous la
pression du personnel d’agir pour
le retrait de ce point du conseil de
surveillance qu’il préside. Sans
s’en remettre aux promesses des uns et des autres, le personnel a
décidé dans une nouvelle AG
d’une extension de la grève du
zèle et d’une action forte le jour
du conseil de surveillance, le 17
décembre 2014.

Le personnel avait organisé ce
jour-là un comité d’accueil pour
les membres du conseil de surveillance.
Le directeur s’obstinant
à ne rien vouloir négocier, le personnel
a envahi la salle et retenu
tout ce petit monde pour une discussion
de plusieurs heures. L’entêtement
autoritaire du Directeur
a fortement tendu la discussion
et le personnel a fini par réclamer
bruyamment sa démission.
Résultat, nouvelle promesse écrite
de négociation, engagement
d’ouverture de négociation en
présence de spécialistes de l’ARS
sur le temps de travail.

Début 2015 c’est avec cynisme
que l’ARS a avoué qu’elle pourrait
finalement débloquer un budget
de 400 000 euros si un plan
d’économie soi-disant « partagé »
était négocié par le personnel et
la direction, une vraie provocation
quand on sait que c’est l’ARS
qui a orchestré le déficit de l’hôpital
 !

Le personnel a suspendu une
partie de sa grève du zèle, et
après quelques péripéties en
comité technique d’établissement
(CTE) début 2015, où le
directeur a fait dans un premier
temps des propositions provocatrices,
des négociations vont
s’ouvrir sur trois mois avec les
représentants de l’intersyndicale.
L’intersyndicale a dressé
des pistes d’un « contre plan
d’économie » qui consiste
notamment à restituer à l’hôpital
des budgets abusivement
détournés vers l’hôpital départemental.

UNE LUTTE EXEMPLAIRE

Même si la victoire reste encore
à venir, c’est pied à pied, par l’unité,
l’action directe des salarié-es
et la démocratie dans la lutte,
que les salarié-e-s ont résisté.
C’est un exemple fort que montrent
les personnels du centre
hospitalier Mas Careiron aux
salarié-e-s du secteur et du
département. L’appropriation
collective de la lutte a été un
point fort ainsi que la compréhension
progressive du fait que
pour desserrer l’étau de l’austérité
budgétaire, il est nécessaire de
se coordonner pour combattre
ensemble en tissant des liens
solidaires. Une initiative de la
convergence des hôpitaux en lutte
devrait avoir lieu prochainement,
en plus des éventuelles
mobilisations intersyndicales
auxquelles elle a prévu de participer,
pour tenter de contrecarrer
le projet de loi santé de Marisol
Touraine qui prévoit encore trois
milliards d’économie sur les
hôpitaux.

Berneri (AL Gard)

On peut suivre la lutte des personnels du CH le Mas Careiron
sur le blog : sudsanteuzes.over-blog.fr

 
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