Politique

Il vit ici, il reste ici : où es-tu, Madama ?




Madama, un jeune migrant malien menacé d’expulsion par la préfecture de Haute-Loire, s’est enfui de sa famille d’accueil. L’État, par les pressions et la peur, a eu raison du jeune homme, mais aussi de la famille qui l’accueillait depuis deux ans. Retour sur les violences et le racisme ordinaire de l’administration française.

Madama est parti. Probablement par peur de se faire arrêter suite aux pressions de la préfecture. On ne sait pas où il se réfugie, ni comment il vit ou plutôt survit. Nous n’avons aucune nouvelle et nous sommes très affectés après plus de deux ans de vie commune avec lui. La machine étatique à broyer a parfaitement fonctionné, mais nous n’abandonnons pas puisqu’il reste des recours juridiques.

Pourtant Madama avait tout pour réussir sa vie  : une école, des supers maîtres d’apprentissage, une famille, mais la préfecture de Haute-Loire a décidé d’en faire un symbole des politiques intransigeantes en matière d’immigration. Tout comme elle a décidé de jouer le jeu des élections en donnant à une frange de la population des garanties en matière d’expulsion. Et si par la même occasion elle peut se payer des militant⋅es, la préfecture ne va pas se gêner ! Derrière ce combat nous avons pris en pleine figure les méthodes de l’État pour contrôler les populations par la terreur. L’État use d’une violence, symbolique et souvent sans définition juridique  : il s’agit de la violence psychologique des administrations.

Contrôler par la peur

Par la peur, les pressions, les ordres, les contre-ordres, les attentes, les demandes irréalisables, les menaces parfois, elles contribuent au découragement de nombreux migrant⋅es et à leur auto-clandestinité qui servira le monde des patrons négriers. Ce sont les mêmes méthodes avec Pôle Emploi vers l’auto-exclusion des chômeurs et chômeuses, ou celles de l’Éducation nationale avec Parcoursup menant vers une sélection plus accrue des jeunes.
L’État a ainsi renforcé un moyen de contrôle des populations en mettant son personnel au service de son idéologie (certains sont vraiment racistes, d’autres essaient de résister : on a connu les deux avec Madama). La plupart de ces fonctionnaires des services de l’immigration n’étant pas plus, pas moins racistes que le reste des français, faisant juste leur travail par habitude. La taylorisation de ces tâches, renforcée par la technologie qui permet la dématérialisation et la déshumanisation aliènent complètement ces fonctionnaires, facilitant la mise en place par l’État de son idéologie.

Et puis si la soumission et le contrôle par cette violence sont insuffisants, il reste à l’État la possibilité de réprimer. C’est ce que nous vivons, parce que nous avons fait preuve de solidarité et, grâce aux nombreux soutiens mobilisés au-delà du département. C’est de trop pour la police notamment qui poursuit à deux reprises Éric pour outrage. Les deux fois dans des contextes particuliers  : la première lors de la délivrance de l’OQTF, où la préfecture nous était interdite par des flics en service dont certains provocateurs avec en évidence un bandeau Alliance autour du cou. La deuxième, lors de la garde à vue de Madama et sa mise au dépôt en centre de rétention d’une manière pour nous très brutale. Enfin, lors d’un rassemblement pour les intermittents où nous avons été les seuls à avoir été verbalisés malgré les promesses de la police de ne pas le faire.

Donc la lutte continue toujours pour Madama, mais aussi contre la répression de sa famille d’accueil, et, d’une manière plus générale, contre les abus et l’inhumanité des politiques migratoires.

Véro et Eric ,
famille d’accueil de Madama

 
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