Les Classiques de la subversion : Angela Davis Femme, race et classe




Angela Davis est une militante du mouvement noir américain, féministe et révolutionnaire. Elle a milité aux cotés du Black Panthers Party. Elle comprend très vite que seule l’unité des mouvements sociaux et politiques entre blancs et noirs, hommes et femmes permettra de combattre la classe dirigeante.

Dans son livre Femmes, race et classe, Angela Davis s’affaire à un travail historique sur l’histoire du mouvement féministe noir aux États-unis. Elle y fait une analyse critique et comparative du féminisme du siècle dernier en regard des luttes d’émancipations et de libération du peuple noir. Elle analyse notamment les contradictions racistes et classistes qui survenaient au sein des mouvements abolitionnistes et féministes blancs.

Ces contradictions n’étaient pas anodines, Angela Davis traite chaque question en démontrant les écueils que provoquait le racisme dans le mouvement féministe blanc : on note, au sortir de la Guerre de Sécession, le rapprochement entre les dirigeantes du mouvement pour le droit des femmes comme Elizabeth Stanton avec des politiciens sudistes racistes qui défendent la priorité du vote de femmes sur celui des noirs. À noter pendant les années 1960-1970, l’alignement de certaines féministes blanches sur les politiques de stérilisations forcées imposées aux femmes des minorités indiennes, portoricaines et noires.

Mais son ouvrage démontre également comment ces luttes ont porté leurs fruits à chaque fois qu’elles ont été solidaires. Angela Davis met ainsi en lumière que la prise en compte de toutes les oppressions de façon égale et sous tous ces aspects est un préalable à l’émancipation de toutes et tous. Elle explique ainsi que certaines revendications des femmes noires sont communes avec les femmes blanches et celle des autres groupes vivant la domination raciale, au même titre que les femmes noires ont en commun une oppression spécifique avec les hommes noirs. Mais surtout, l’ouvrage démontre aussi l’écueil empêchant cette convergence, à savoir que la dépossession des plus opprimé-e-s, dans ce cas les femmes prolétaires des minorités raciales, conduit à un décalage d’intérêts, de priorités et de sous-estimation des interdépendances qui existent au sein des catégories dominées.

Cet ouvrage est toujours d’actualité : ces contradictions ne sont pas sans faire penser à celles survenant aussi en France.

Les contradictions à dépasser entre les oppressions spécifiques est une question centrale aujourd’hui. La réponse se trouve dans l’articulation des luttes antiracistes, féministes et anticapitalistes, sans les hiérarchiser, et dans l’organisation en priorité des plus opprimé-e-s au sein de ces couches. Femmes, race et classe montrent qu’aux États-Unis, ce sont les femmes noires prolétarisées qui ouvrent la voie.

Nicolas Pasadena (AL Montreuil)

• Angela Davis, Femmes, race et classe, Editions des Femmes, 1983, 341 pages, 15,25 euros.

 
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