Lire : Colloghan, « Le droit universel à la moustache »- livre graphique
L’exemplaire lutte des ouvriers limonadiers restaurateurs pour le droit au port de la moustache, voilà un sous-titre qui donne envie d’en savoir plus. Du droit de porter la moustache, on en parle, mais pas que ! C’est notre ami Mathieu Colloghan que nous devons remercier pour ce moment de lutte enragée pour le droit à la dignité, l’illustre artiste qui vous fait régulièrement l’honneur d’embellir les pages de votre journal préféré.
Son livre Le Droit universel à la moustache revient sur un moment important de la période syndicaliste révolutionnaire de la CGT, cette période d’intense construction des luttes, pendant laquelle l’enjeu essentiel des revendications – la dignité, le repos hebdomadaire, la journée de huit heures – s’accorde à la radicalité des moyens mis en œuvre : la grève, le sabotage, l’action directe.
1907, c’est une année importante pour les ouvriers du secteur de l’alimentation – boulangers, bouchers, garçons de café, personnels de maison – qui vont s’organiser pour faire aboutir leurs revendications. Les garçons de café d’ailleurs, parlons-en ! Le droit à la dignité est essentiel dans leurs revendications. D’ailleurs, ils revendiquent de s’appeler ouvriers limonadiers ! Et jusqu’à la grève de 1907, le droit à porter la moustache leur est refusé.
« Le poil à la barbe, c’est ce qui fait de l’homme un adulte intégralement, un citoyen majeur. […] Or chez les domestiques et les garçons de café, les hommes se voient interdire par contrat la moustache […]. Le message est clair : vous n’êtes pas nos frères en humanité, vous êtes nos domestiques. »
Avec des textes courts magnifiquement illustrés, Colloghan nous plonge dans cette effervescence des mobilisations des métiers de l’alimentation, l’ambiance enfiévrée des réunions à la Bourse du Travail, les manifs sauvages pour tromper la préfecture, les techniques de sioux pour rallier les hésitants ou miner les jaunes.
Une lecture essentielle et salvatrice en pleine bataille pour la défense de nos retraites, qui nous rappelle que chacun de nos droits a été arraché au patronat par la lutte obstinée et la détermination sans faille des travailleuses et des travailleurs. Chapeau l’artiste !
Franz Müller (UCL Paris Nord-Est)
- Mathieu Colloghan, Le Droit universel à la moustache, ABC éditions, 2022, 18,50 euros.
