Massacre de Ceuta et Melilla : Mort à l’Europe de Schengen !




La frontière située entre le Maroc et les enclaves européennes de Ceuta et Melilla (Espagne) a connu des heures sanglantes. Alors que des centaines de migrant(e)s tentaient de passer de l’autre côté des barbelés, l’armée marocaine a tiré. Des hommes et des femmes sont tombé(e)s sous les balles aux portes de l’Europe de Schengen.

Cette Europe qui semble découvrir le sort de ces Africain(e)s joue la vierge effarouchée. Racketté(e)s, tabassé(é)s, violé(e)s, torturé(é)s, abandonné(e)s dans le désert ou noyé(e)s dans le silence de la mer, ces morts sont celles de l’Europe forteresse. Quel est donc le crime de ces migrant(e)s pour lesquel(le)s on réhabilite la peine de mort ? L’envie légitime d’aller vivre ailleurs. La volonté d’éduquer leurs enfants. L’espoir que l’argent envoyé « au pays » améliorera le quotidien de leur village. L’espoir des miettes de l’arrogante richesse européenne. Le mirage de notre société « démocratique » si inégalitaire.

Bien souvent, à leur arrivée, c’est l’exploitation économique et la misère qui les attend. Des petits boulots non déclarés aux filières organisées de travail non déclaré, le patronat utilise abondamment cette main-d’œuvre. Isolé(e)s, à la merci du moindre contrôle, ces travailleu(ses)rs subissent l’arbitraire patronal : rétention de passeport, séquestration, viol et violences diverses, bas salaires, dévalorisation professionnelle…

Dans le même temps, les immigré(e)s sont la cible des discours xénophobes de la part de politiciens, prompts à en faire les boucs-émissaires de leur politique de démolition sociale, les jetant hors de leur logement, pourchassant des mineur(e)s dans les écoles pour les expulser, raflant nos voisin(e)s dans nos quartiers pour remplir des charters. Cette politique nous mène droit à la barbarie. Ces événements tragiques aux frontières de Ceuta et Melilla montrent clairement ce que signifie la fermeture et la militarisation des frontières d’une Europe devenue forteresse grâce aux accords de Schengen. La Commission européenne est prête à offrir 40 millions d’euros au Maroc pour le contrôle de la frontière ; Sarkozy visite les camps du dictateur Kadhafi devenu à nouveau fréquentable.

Détruire les frontières

Assez d’hypocrisie ! Cessons de collaborer à ce système inique. Si vraiment nous voulons éviter ces morts, alors il faut détruire les frontières. Abrogeons le traité de Schengen et les lois sur le séjour des immigré(e)s, sinon il ne restera que la mort, la souffrance, la répression, la violation des droits humains de millions de personnes par les États membres de l’Union européenne.

L’Afrique est un continent qui porte en lui presque deux siècles d’exploitation coloniale : le Portugal, la Belgique, Les Pays-Bas, l’Allemagne et en tête du groupe la Grande-Bretagne et la France ont pillé et massacré les peuples d’Afrique ; il est aujourd’hui dominé et écrasé par les États de l’Union européenne et les États-Unis qui laissent les immenses richesses naturelles du continent africain aux mains des multinationales, soudoient les gouvernements, maintiennent les dictatures, entretiennent des guerres fratricides.

Comme l’expliquent nos camarades italiens F. Raimondi et M. Ricciardi, dans le dernier numéro de Débattre, « indispensable au fonctionnement de l’économie, l’immigration est appelée par la globalisation capitaliste. Bien qu’autonome dans ses modalités et dans les motivations poussant les migrants à partir, l’immigration est structurelle, donc constante, non transitoire, non passagère. Partie toujours plus déterminante de la population, l’enracinement progressif des migrants met fin à l’idée que le phénomène migratoire puisse être endigué par des mesures extraordinaires en attendant sa disparition ». (cf. « La grève de Vicenza », F. Raimondi et M. Ricciardi, Débattre n°19). Comment, en ce cas, nier aux peuples africains le droit de venir en Europe ? Comment empêcher tout un continent de défendre son droit de vivre ?

La solidarité comme arme

À ces questions, nombreux sont ceux qui répondent par la solidarité. Spontanément, comme ces passants qui ont interrompu une rafle de la police dans le quartier Château-d’Eau (Paris Xe), ou ces individus qui se joignent aux manifestations. D’autres s’organisent : par la grève, comme ces lycéennes et lycéens de Saint-Nazaire et d’ailleurs, en lutte pour la régularisation de leurs camarades de classe ; dans des réseaux, comme le Réseau éducation sans frontières (RESF, voir page 10) où des enseignant(e)s et des parents d’élèves assurent la défense et la protection d’enfants scolarisés ; les organisations de soutien aux étranger(e)s enfin, qui se battent et soutiennent les migrant(e)s dans leurs démarches.

Pour Alternative libertaire, la seule chose viable et réaliste, c’est de renforcer ces groupes travaillant quotidiennement auprès des migrant(e)s dans les écoles, les quartiers ou les villes, pour que ce mouvement social reste autonome, solidaire et combatif, qu’il continue d’assumer avec courage les droits de toutes et tous. Un mouvement capable de construire une société où les libertés de circulation et d’installation ne seraient pas de vains mots !

Erwan (AL Finistère)

 
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