International

Pérou : Le pouvoir au pied du mur




Le Pérou vient de connaître une crise politique et institutionnelle qui a mis en lumière la force du mouvement populaire.

Au mois de novembre, le Pérou a vu se succéder en dix jours trois présidents, du centre ou du centre droit, à la tête de l’État. La destitution par le Parlement du président Martín Vizcarra au profit de Manuel Merino a entraîné une vague protestation populaire et des manifestations de rue qui ont fait face à une répression violente des forces de l’ordre équipées d’armes à feu. Deux jeunes manifestants ont été tués par des tirs de policiers le 14 novembre et des dizaines d’autres ont été blessés.

Acculé, Manuel Merino démissionne le lendemain après seulement cinq jours au pouvoir, et le nouveau président Francisco Sagasti limoge le commandant en chef de la police nationale ainsi que quinze généraux de haut rang et annonce une «  réforme de la police nationale  » visant à améliorer les droits des citoyens.

Cette crise institutionnelle et politique est un affrontement entre des secteurs de la bourgeoisie et de la droite avec des intérêts et des agendas politiques divergents [1].

Continuité putschiste 

C’est l’analyse que livrent nos camarades de la Coordination anarchiste latino-américaine (CALA) qui regroupe la Coordination anarchiste brésilienne, la Fédération anarchiste de Rosario en Argentine et la Fédération Anarchiste Uruguayenne [2] exprimant leur «  plus grande solidarité avec les frères et sœurs du peuple péruvien et de ses organisations, qui ont fait face à un nouveau coup d’État accompagné d’une violente répression de la part des secteurs dominants locaux.

Ces secteurs qui ont généré une situation de coup d’État institutionnel ces derniers jours, en faisant descendre les militaires dans la rue pour discipliner et contrôler un peuple fatigué, sont les mêmes secteurs qui au cours des dernières décennies ont généré un véritable massacre avec la “guerre sale” dans les années 1980 et 1990 [3], qui ont cautionné l’auto-coup d’État de Fujimori en 1992, le massacre de Bagua en 2009 [4] et qui ont négocié avec Odebrecht [5]. […]

C’est pourquoi la mobilisation générale de la semaine dernière est une nouvelle expression de la lassitude de la population face à un système politique, social et économique qui n’a fait qu’assujettir et affamer les secteurs opprimés. C’est l’expression la plus puissante de la longue et déterminée résistance de tout un peuple.

Comme l’affirment depuis longtemps le camp populaire organisé au Pérou, “le problème est structurel”et “la réponse est populaire”. Ce coup d’État dirigé par Mérinos, qui a déjà échoué grâce à la lutte du peuple, ouvre également une période d’instabilité et de réadaptation des secteurs dominants pour approfondir le modèle néolibéral, le pillage et la répression des peuples qui résistent depuis plus de 528 ans. »

Coordination anarchiste latino-américaine (réseau Anarkismo)

[1Franz Verne, « Crónica de una vacancia anunciada o disputa interburguesa en Perú », novembre 2020, Anarkismo.net.

[2Coordination anarchiste latino-américaine, « Solidarité avec la résistance du peuple péruvien », novembre 2020.

[3L’Etat péruvien et ses forces armées ont commis des exactions à grande échelle dans la « guerre contre le terrorisme » (tortures, escadrons de la mort, exécutions sommaires, massacres de civils).

[4En juin 2009, les forces armées péruviennes interviennent contre des manifestants indigènes, les affrontements font 33 morts (20 policiers et 10 civils).

[5Affaire politico-financière impliquant l’entreprise de BTP brésilienne Odebrecht et des responsables politiques et dirigeants d’Amérique latine, dont plusieurs présidents péruviens.

 
☰ Accès rapide
Retour en haut