Proche-Orient : Oslo ou comment Israël a perpétué l’occupation




Vingt ans après les accords d’Oslo de 1993, le constat est clair : le compromis voulu par Yasser Arafat était un marché de dupes. La colonisation ne s’est jamais arrêtée. La campagne Boycott, Désinvestissement Sanctions (BDS) est la nouvelle voie choisie par les Palestiniens et les Palestiniennes dans leur lutte.

Le processus de paix d’Oslo a en fait commencé à Alger en 1988. L’Organisation de libération de la Palestine (OLP) avait subi des défaites terribles : Septembre noir en Jordanie (1970) et expulsion du Liban (1983) sous les coups conjoints des armées syrienne et israélienne. Le peuple palestinien avait déclenché spontanément l’Intifada réprimée avec une très grande violence par un certain… Yitzhak Rabin. Pour Arafat, il y avait l’espoir qu’en limitant la revendication d’un État palestinien aux 22 % de la Palestine historique conquis depuis 1967, il aurait le soutien de la communauté internationale. Il a donc reconnu (sans contrepartie) Israël dans ses frontières d’avant 1967.

Dès le début, il a été très vivement critiqué par la gauche palestinienne (notamment le Front populaire de libération de la Palestine, FPLP), par des intellectuels palestiniens comme Edward Saïd et par un mouvement en plein développement : le Hamas. L’acte d’Arafat laissait sans espoir les réfugié-e-s, les Palestiniens d’Israël et même ceux de Jérusalem.

En Israël, la colonisation a été planifiée depuis 1967 avec un courant « national-religieux » en plein essor qui a fourni les premiers colons. En comptant les « nouveaux quartiers » de Jérusalem-Est annexés depuis 1967, les colons étaient déjà près de 200 000 en 1990. Israël est alors confronté à une grave crise économique causée à la fois par le départ des travailleurs palestiniens licenciés lors de l’Intifada et par le coût de l’immigration des Juifs soviétiques.

Un marché de dupes

À Oslo, l’OLP a reconnu Israël dans ses frontières d’avant 1967 mais le gouvernement israélien s’est contenté de reconnaître l’OLP pour la remplacer d’ailleurs par une « autorité palestinienne » dont le rôle essentiel a consisté à assurer la sécurité de l’occupant. Rien n’a été signé sur la création d’un État palestinien. Arafat rêvait d’une « paix des braves ». Or, si les sionistes peuvent diverger sur les moyens de marginaliser les Palestiniens, ils ont tous le même but. Après l’attentat du Caveau des Patriarches en 1994 (29 Palestiniens massacrés), Rabin a envoyé 2 000 soldats à Hébron pour protéger les colons intégristes. Pendant les deux ans qui ont séparé les accords d’Oslo de son assassinat, il a installé 60 000 nouveaux colons. Il a signé avec Arafat la division de la Palestine en trois zones (A, B et C), antichambre de sa transformation en bantoustans. Son successeur Pérès a multiplié les provocations meurtrières (assassinat de Yahia Ayache à Gaza, bombardement de Cana au Liban) légitimant ainsi le discours de la droite et favorisant son retour. Le « processus de paix » est alors devenu une farce sinistre. En 2001, Ehud Barak et Clinton ont sommé Arafat de signer sa capitulation comme acte final d’Oslo. Arafat a refusé et on lui a fait porter la responsabilité de l’échec en proclamant « qu’il n’y avait pas de partenaire pour la paix ». Depuis Oslo, en 20 ans, le nombre de colons a triplé.

Palestine divisée

Le compromis très généreux initié par les Palestiniens en 1988 (et donc la « solution à deux États ») est définitivement mort. On est passé à une situation d’apartheid où 50 % de la population est palestinienne et est privée des droits les plus élémentaires. Les Palestiniens ne se battent plus pour un État réduit à quelques cantons non-viables, mais pour des revendications universelles qui sont celles de l’appel mondial de 2005 au boycott, désinvestissement, sanctions : fin de l’occupation et de la colonisation, libération des prisonniers, égalité des droits et droit au retour des réfugié-e-s.

Ce qui reste d’Oslo c’est la division de la Palestine qui n’a pas d’État mais a deux gouvernements rivaux. C’est le fait que ces « gouvernements », notamment l’Autorité palestinienne, maintiennent une fiction qui permet à la colonisation d’avancer à toute allure. Il est temps que le mouvement de solidarité tire un trait définitif sur le mythe tragique selon lequel le processus d’Oslo pouvait mener à une paix juste.

Pierre Stambul

 
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