Syndicalisme

Psychiatrie dans le Calvados : Santé mentale en grève




Nouvelle journée de grève le 12 mars dernier à l’Établissement public de santé mentale (EPSM) de Caen. Réunies sous les barnums de la CGT EPSM, les grévistes dénonçaient notamment le gel du point d’indice, la baisse de certaines indemnités et la mise en place d’un jour de carence. L’UCL Caen est allée à leur rencontre.

Les discussions vont bon train sous le barnum du piquet de grève à l’entrée de l’EPSM de Caen. Premier sujet majeur : « Il y a eu plusieurs annonces de fermetures temporaires depuis 2 ans et un service a été totalement fermé. Dernièrement, un service ne pouvait plus accueillir les patients. ». La politique globale de suppression de lits continue de faire des ravages. Mais c’est aussi le manque de médecins qui est en cause. Sans psychiatre, pas d’accueil de patients et patientes. Les services sont alors fermés et les postes sont réaffectés ou supprimés à terme.

Les salariées de l’EPSM ont choisi de débrayer à tour de rôle à raison d’un quart d’heure par personne. Ainsi le service minimal est assuré et cela permet de répondre aux besoins des usagers et usagères du système de santé. Le nombre de grévistes a son importance pour la CGT afin de peser dans les négociations : « Avec la direction, y a des choses qu’on pourrait négocier localement ». Ce mode d’action remporte davantage l’adhésion des salariées qui peuvent ainsi passer sur le piquet et être comptabilisées comme grévistes.

UCL Caen

L’EPSM représente près de 70 % de la couverture des services en santé mentale du Calvados. La fermeture de lits impacte fortement la prise en charge des usagers et usagères et renvoie la prise en charge à leur entourage pour celles et ceux qui en ont : « On ne peut pas répondre aux besoins de la population, certains patients et patientes, on ne sait pas ce qu’ils et elles deviennent et on fait porter le soin sur les familles ».

Au-delà du nombre de places, c’est également la qualité du service et des soins qui est dégradée : « Il y a une grosse perte de sens au travail. On sait qu’on ne fait pas le maximum car c’est devenu principalement des tâches logistiques ». La rationalisation de l’activité entraîne la protocolisation du moindre geste de soin et une surcharge de travail. L’écoute et l’accompagnement social auprès des patients et patientes passent à la trappe : « Du temps de soignant qui ne rapporte rien ».

« L’empêchement » décrit bien cette stratégie de destruction du secteur de la santé mentale [1]. Les services sont précipités dans un cercle vicieux de rationalisation et de dégradation du service dont l’objectif n’est autre qu’une bascule vers une santé privée.

« On décide de se battre, c’est une question de société, ça va au-delà de l’hôpital. Qu’est-ce qu’on veut pour la population ? Est-ce qu’on veut des services publics qui soient efficaces ? » Les témoignages des soignantes et soignants en lutte de l’EPSM du Calvados nous montrent comment les luttes pour les conditions de travail et la qualité des services de santé se rejoignent. Elles ouvrent une question plus large de choix de société, là où les besoins de soins en santé mentale concerneraient un Français ou Française sur cinq.

Témoignages recueillis auprès des grévistes

Marie et Sol (UCL Caen)

[1N. Vézinat, Le service public empêché, PUF, 2025.

 
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