Services publics : La petite enfance en lutte




Deux luttes tiennent actuellement le haut du pavé dans le secteur de la petite enfance : celle pour la réintégration des salariées d’une crèche d’entreprises privée, et celle pour la défense des services publics de la petite enfance autour d’une campagne intitulée « Pas de bébé à la consigne ».

La halte garderie Giono dans le 13e arrondissement est une structure d’accueil municipale, gérée sous la forme d’une délégation de service public. Associative jusqu’en 2006, elle est confiée par la mairie de Paris à l’entreprise privée People&Baby. Les salariées sont immédiatement confrontées à une dégradation de leurs conditions de travail et à la remise en cause de leur projet pédagogique.

Répression syndicale chez People & Baby

Celles-ci décident de monter en novembre 2009 une section syndicale CNT. Le 1er mars 2010, la section appelle à une journée de grève pour dénoncer les pressions de la direction et revendiquer de meilleures conditions de travail. Le lendemain, les cinq salariées grévistes (sur les neuf de la halte garderie Giono) sont mises à pied avant d’être licenciées pour trois d’entre elles, mutée dans une autre structure pour une, seule la représentante de la section syndicale étant réintégrée sur son lieu de travail grâce à sa protection légale. Les raisons fallacieuses et changeantes (insubordination, problèmes d’hygiène et de sécurité) invoquées par la direction de People&Baby alors même qu’aucun reproche n’avait jusque là été fait à ces salariées, ne doivent pas faire illusion. C’est bien l’action syndicale et le fait de grève qui sont réprimés.

Depuis deux mois, les deux salariées réintégrées sont en grève pour exiger avec leurs trois collègues la réintégration de toutes. Avec le soutien des parents des enfants et d’autres salarié-e-s, elles ont multiplié les actions de protestation et d’interpellation des pouvoirs publics, des organisations et des habitants de l’arrondissement. Aujourd’hui, après plus de deux mois de lutte elles ont mépris, mensonges et menaces comme seule réponse.

La situation de la halte garderie Giono met en évidence la nécessité d’une véritable politique publique de la petite enfance. Force est de constater que la pédagogie, la qualité de l’accueil des enfants, tout comme les conditions de travail et le respect des salarié-e-s ne font pas bon ménage avec le profit ! On sait depuis longtemps que la prise en charge des tous petits est une étape cruciale pour leur développement à venir. On sait aussi que l’insuffisance des services d’accueil aggrave les inégalités, d’abord pour les femmes qui se retrouvent éloignées de force du travail. Comme dans tous les services publics, le recours généralisé à la sous-traitance, aux externalisations et aux délégations de service public remet en cause tant les droits des salarié-e-s que la qualité du service rendu à la collectivité et finalement la notion même de service public.

Pour un service public de la petite enfance

Et c’est là que cette lutte rejoint celle du collectif Pas de bébé à la consigne en lutte contre plusieurs attaques du service public de la petite enfance. Le nouveau décret sur les établissements d’accueil des jeunes enfants (EAJE) prévoit une baisse des taux d’encadrement des crèches, ainsi que l’ouverture de 8 000 jardins d’enfants, aux capacités d’accueil totalement indéterminées. Par ailleurs il abaisse les critères en termes de qualification de ces métiers.

La proposition de loi sur les Maisons d’assistantes maternelles (MAM), adoptée par l’Assemblée nationale le 4 mai, consiste quant à elle en une dérégulation encore plus large : baisse du taux d’encadrement, simple contrat de travail entre les professionnelles et les familles, possibilité d’agréer des assistantes inégalement qualifiées à condition qu’elles se regroupent... Une telle précarisation de métiers féminisés est scandaleuse. Enfin, ces attaques accompagnent une politique d’étranglement des capacités d’accueil des écoles maternelles, qui ont perdu 40 000 postes en trois ans.

Contre ces reculs considérables, le collectif Pas de Bébés à la Consigne se mobilise. Il réclame le retrait du décret sur l’accueil collectif, le rejet de la proposition de loi sur les MAM, ainsi que le rétablissement des postes supprimés dans l’Education nationale. Enfin, il demande « un plan d’urgence pour l’accueil de la petite enfance, incluant des mesures ambitieuses de formation de professionnelles qualifiées par l’accroissement substantiel des places et des crédits dans les écoles de formation. »

Emilie (AL Saint-Denis) et Fanny (AL 93)

 
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