Société policière : Syndicaliste ? Gay ?... Vous êtes fichés !




La création de fichiers de renseignement n’est pas un phénomène nouveau, mais on assiste aujourd’hui à la systématisation et à la généralisation d’une logique de fichage qui s’étend potentiellement à tous les individus.

Avec la création, en juillet 2008, de la direction centrale du renseignement intérieur (DCRI), fusion de la Direction de la surveillance du territoire (DST) et des Renseignements généraux (RG), est également apparu un nouveau fichier policier. Baptisé Edvige (acronyme pour Exploitation documentaire et valorisation de l’information générale), il doit recueillir des « données à caractère personnel » collectées sur « des individus [dès l’âge de 13 ans], groupes, organisations et personnes morales […] susceptibles de porter atteinte à l’ordre public », et plus explicitement sur les individus « ayant exercé ou exerçant un mandat politique, syndical ou économique ». Bref, les critères sont flous et les données récoltées très larges : téléphone, mail, adresse, « signes physiques particuliers et objectifs, photographies et comportement » ainsi que des données « relatives à l’environnement de la personne », c’est-à-dire aux personnes proches des « fiché-e-s » [1].

Dans l’ombre d’Edvige, le fichier Cristina [2], classé secret défense, contient des informations personnelles sur les individus mais est hors de contrôle de la Cnil. Quant au logiciel Ardoise utilisé par les services de police dans le cadre d’une enquête, il catégorise les individus entre autres selon leur orientation sexuelle ou leur statut de permanent syndical. Enfin, le gouvernement élabore pour l’automne un autre fichier, Périclès, facilitant dans le cadre de la Lopsi [3] les écoutes téléphoniques, l’introduction de logiciels espions dans les ordinateurs des individus, etc.

85 000 pétitionnaires contre Edvige

On peut dès lors s’interroger sur les dérives d’une telle réorganisation du renseignement ainsi que sur la nature du pouvoir qui l’institutionnalise, ce qui n’est pas sans rappeler certaines pages sombres de l’histoire. Car, bien qu’Edvige ne soit pas le premier fichier de ce type, il s’inscrit dans une logique de contrôle social et de démantèlement des droits et des libertés : criminalisation des militantes et militants sociaux et politiques, remise en cause du droit de grève...

Les réactions ne se sont pas faites attendre puisque ce sont plus de 85 000 personnes et 600 organisations qui ont déjà signé la pétition pour l’abandon du fichier Edvige [4]. De premiers rendez-vous ont réuni cet été près de 30 organisations, mais d’autres initiatives sont à prendre en septembre. Car la mobilisation contre Edvige devra être coordonnée et pensée avec les autres luttes de la rentrée.

Marie-Au (AL Paris Nord Est)

[1Décret n° 2008-632 du 27 juin 2008 portant création d’un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé Edvige

[2Arrêté du 27 juin 2008 relatif à la protection des secrets de la défense nationale au sein des services de la direction centrale du renseignement intérieur

[3Loi n° 2002-1094 du 29 août 2002 d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure

 
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