Politique

Suède : Le crépuscule de la social démocratie




Les élections de septembre dernier en Suède, perdues par les sociaux-démocrates au profit d’une alliance des droites, est le symbole de l’incapacité systémique de la stratégie sociale-démocrate.

Les élections législatives suédoises du 11 septembre dernier ont vu la courte victoire (de 3 sièges) d’une coalition composée des libéraux, des conservateurs et de l’extrême droite. Le parti de ces derniers, les Démocrates de Suède (Sverigedemokraterna, SD), fondé par des militants néonazis [1], a obtenu pour l’occasion le deuxième plus haut score avec 20,5 % des voix.

La présence de l’extrême droite en tant que force politique installée dans le paysage politique n’est plus une surprise depuis qu’en 2014, ce même parti des Démocrates de Suède, fort de ses 49 sièges au Parlement, avait réussi à faire tomber le gouvernement social-démocrate de l’époque, sans pour autant intégrer la coalition de droite. La nouveauté est aujourd’hui que l’extrême droite est partie prenante d’un bloc de droite (de toutes les droites) qui s’était annoncé dès la campagne prêt à travailler main dans la main.

Une « dédiabolisation » qui profite aux capitalistes

Première leçon de ces élections, les libéraux sont tout disposés, comme ici, à gouverner avec l’extrême droite pour faire avancer leur agenda ultralibéral, bien que les sociaux-démocrates ne représentent aucunement, à l’image de ce qu’est le PS en France, une menace pour le système capitaliste. L’extrême droite n’est pas et ne sera jamais une solution pour celles et ceux qui veulent se débarrasser de ce système, elle en est même une gardienne efficace [2]. De même qu’il est illusoire de penser que l’extrême droite se normaliserait en s’institutionnalisant. C’est au contraire tout le système qui s’«  extrêmedroitise  ».

Seconde leçon, le projet social-démocrate – au sens de parvenir par la voie des élections et de la prise du pouvoir de façon légitime dans le processus de la démocratie libérale bourgeoise à imposer le socialisme – est systématiquement voué à l’échec. Nous n’en doutions pas de notre côté mais cet espoir revient de façon cyclique et emporte même parfois l’enthousiasme de certaines camarades anticapitalistes.

Même à son apogée dans les années 1970, la sociale-démocratie n’a pas pu imposer des projets réformateurs ambitieux dont l’aboutissement aurait été de donner un peu plus de pouvoir aux salariées au détriment des actionnaires [3]. Et plutôt que d’acter l’échec de la voie réformiste adoptée en 1917, celle-ci s’est faite l’artisan zélé de la progressive libéralisation du pays  : les services publics, les hôpitaux, les écoles, les retraites, tout a été progressivement ouvert au privé avec comme effet une augmentations croissante des inégalités et une extrême droite triomphante.

Aujourd’hui faute de perspectives d’émancipation collectives et d’égalité politique, économique et sociale, la gauche électorale est condamnée à court ou moyen terme. Nous ne la pleurerons pas. Mais il est nécessaire de construire collectivement un nouveau projet de société émancipateur à opposer aux libéraux, conservateurs et réactionnaires de tous poils.

David (UCL Chambéry)

[1Anders Klarström qui en fut le premier dirigeant est un ancien militant du Parti du Reich nordique.

[2Lire aussi « En Suède, les acteurs privés du secteur public soulagés », Le Monde, 14 septembre 2022.

 
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