Syndicalisme : Le STC victime de son succès




Le Syndicat des travailleurs corses traverse une crise de croissance. Le projet initial d’un syndicalisme de lutte ne va pas de soi dans toutes les sections locales. L’heure est à la cohésion… et à recueillir l’expérience des homologues antillais.

L’heure est à la cohésion au Syndicat des travailleurs corses. Le STC compte désormais plus de 5 000 adhérentes et adhérents, et a triomphé aux élections prud’homales de 2008 : 37,95 % en Corse du sud et 40,11 % en Haute-Corse, devançant la CGT dans les deux cas. Le syndicat s’installe première force syndicale de l’île, et s’extirpe petit à petit de son isolement grâce à des luttes comme celle de l’hôpital d’Aiacciu.

Le congrès tenu en mai 2006 mettait en concurrence deux motions : la première, plus radicale et indépendantiste, a été mise en minorité par la seconde, plus dans la « structuration » et l’installation consensuelle dans le paysage syndical. Ce congrès a par ailleurs décidé la création de deux nouvelles structures : une pour les retraités, l’autre pour les chômeuses et les chômeurs.

Le STC fête cette année 25 ans de lutte pour les droits des travailleuses et des travailleurs corses. Contre toute connotation ethnique, le STC définit le peuple corse comme une « communauté de destin » : est corse toute personne qui vit sur l’île et aspire à la défense de ses intérêts. Le STC prône en conséquence la « corsisation de l’économie », par opposition à la non-économie actuelle, marquée par l’exode, l’atrophie du tissu économique local, la « monoculture » que représente l’administration française [1]

Le STC, fédéraliste, reconnaît la souveraineté de chaque section syndicale, donc la primauté de l’action à la base. Le revers de la médaille, c’est la façon dont certaines sections se sont éloignées du projet syndical de lutte défendu au niveau fédéral. On a pu le constater dans la conduite de certaines grèves en Corse du sud ces dernières années. Cela révèle un déficit de cohésion, de coordination, et de formation des nouvelles et des nouveaux militants du STC, comme le reconnaît lui-même Jean-Luc Morucci, secrétaire national du syndicat qui traverse, en bref, une crise de croissance.

Une rencontre avec les syndicalistes antillais

En avril, le STC a débattu avec Myrlin Davidé (Union générale des travailleurs de Guadeloupe) et Patrick Doré (CGT Martinique). Façon de réfléchir à l’élaboration d’une mobilisation dans l’esprit antillais. L’obstacle principal, c’est la nature particulière de l’emploi en Corse, reposant énormément sur de petites entreprises, rongé par le népotisme et par un clientélisme qui met la ou le salarié dans une situation où il est « redevable » d’avoir obtenu un travail, un travail de surcroît souvent non déclaré et sans couverture sociale.

Par ailleurs, le climat tendu avec les autres syndicats freine les possibilités d’une unité syndicale offensive. En revanche, le vide politique, avec des partis français ou corses enlisés dans des guéguerres électoralistes, laisse le STC en position de seule vraie force de proposition. En Guadeloupe, où la configuration est analogue, l’expérience du LKP a conduit le syndicalisme de lutte à occuper la position de force motrice.

Circinellu (AL Aiacciu)

[1Pour plus de détail, lire l’interview de Jean-Luc Morucci (STC) parue dans AL de novembre 2005.

 
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