Féminisme

Toulouse : contre les manipulations masculinistes




Depuis février 2013, quelques hommes prennent régulièrement de la hauteur pour dénoncer une soi disant injustice parentale qui viserait à écarter les pères de leurs enfants lors des procédures de divorce. Derniers en date, Julien Servelles, Stéphane Iltis, Rodolphe, ont investi le toit du Capitole, en centre ville de Toulouse, depuis le 2 octobre. La préfecture, plutôt réactive quand il s’agit d’expulser des familles et des squats, n’a toujours pas réagi !

La justice est, après les grues, le terrain d’action privilégié des masculinistes qui tentent de faire voter des lois en leur faveur. Dernier en date, un amendement au projet de loi sur l’égalité femmes-hommes, voté au Sénat, qui vise à imposer la résidence alternée par défaut lors des procédures de divorces, en cas de conflit entre les deux parents sur le mode de garde.

Les tribunaux ne faisant pas toujours une distinction nette entre conflit et violences conjugales, la conséquence directe de cet amendement, s’il est validé par l’Assemblée nationale, sera d’imposer à des femmes de rester en contact régulier avec leur ex-agresseur, restreignant ainsi leur mobilité géographique et la possibilité pour elles de se reconstruire après de telles violences.

Y a-t-il réellement une injustice parentale, comme le clament ces pères « déchus » ? Les masculinistes affirment que 80% des pères sont écartés de l’éducation de leurs enfants, comme on peut le lire sur le site de l’association SVP-papa. Si dans 80% des cas, la résidence principale de l’enfant est fixée chez la mère, c’est parce que dans la majorité des cas, les parents se mettent d’accord sur ce mode de résidence.

L’étude des dossiers des juges aux affaires familiales montrent que seuls 2% des divorces font l’objet d’un litige pour la garde de l’enfant. Et en cas de litige, le juge accorde plus souvent la résidence principale au père (entre 17% et 26% des procédures) que lorsqu’il y accord entre les parents (7 à 8%), et opte pour la résidence alternée dans environ 10% des cas [1]

On est donc loin des deux millions d’enfants privés de leur père que mettent en avant les associations de défense des pères. Faut-il rappeler qu’il existe déjà une loi (du 4 mars 2002) qui consacre la garde alternée comme la meilleure solution en cas de divorce ?

Qui se cache derrière les mouvements des pères ?

Des pères réclamant l’égalité parentale sont une aubaine pour le développement d’un mouvement masculiniste, qui avance masqué derrière ces « sympathiques » papas. Jouant sur la corde de l’émotion, ils mettent en avant des témoignages de pères floués par la justice, privés du contact avec leurs enfants.

Cependant il suffit de gratter un peu pour voir que la majorité des pères alpinistes sont aussi accusés de violences conjugales et/ou d’enlèvement d’enfants, à l’image de Nicolas Moreno et Serge Charnay, les deux initiateurs du mouvement partis à l’assaut d’une grue à Nantes en février 2013.

L’égalité parentale qu’ils revendiquent est bien différente de celle que prônent les mouvements féministes : il ne s’agit pas, pour les masculinistes, de partager équitablement le travail parental, avant et après le divorce, mais bien d’exercer un contrôle sur leurs ex-conjointes, en utilisant leurs enfants.

Les liens entre ces associations de pères divorcés et des masculinistes plus assumés sont assez clairs : sur le site du collectif de la grue jaune (plateforme de revendications et associations paternelles), on trouve un lien vers le site du Groupe des études sur le sexisme, qui se présente comme un groupe de lutte contre les sexismes et mène en réalité une bataille pour, entre autres, la « désexuation » des violences conjugales, les lois étant selon eux discriminantes pour les hommes.

Quand les dominants défendent leurs privilèges

On l’aura compris, le masculinisme n’est en rien le pendant logique du féminisme, c’est un contre-mouvement réactionnaire qui s’oppose aux avancées sociales permises par les luttes féministes.

Peu organisés en France, les mouvements masculinistes et antiféministes ont trouvé dans la mobilisation dite de la « manif pour tous » un terreau fertile pour développer leurs idées nauséabondes. Ce mouvement homophobe a donné naissance à nombre de groupuscules encore actifs tels que (entre autres) les Hommens, les Antigones ou encore l’Observatoire de la théorie du genre, créé par l’UNI, dont le cheval de bataille est l’éducation à l’égalité filles-garçons dans les écoles.

Ces trois groupes entretiennent des liens étroits avec l’extrême-droite, les mouvements catholiques intégristes comme la fondation Jérôme Lejeune, revendiquent la « complémentarité des sexes », militent contre l’avortement libre et gratuit et bien sûr contre les droits des personnes LGBT.

Une version plus intello du masculinisme est à trouver dans le récent manifeste des 343 salauds : des hommes blancs, riches, hétérosexuels et cultivés reprenant une référence du féminisme pour défendre le droit pour les hommes d’avoir recours à la prostitution.

Face à ces offensives antiféministes, il est nécessaire d’unir nos forces et de rappeler que le patriarcat tue encore tous les jours. Alternative Libertaire réaffirme que les luttes féministes sont plus que jamais d’actualité, et continuera de revendiquer l’égalité pour toutes et tous dans l’ensemble de la société.

AL Toulouse

[1« Le pouvoir vient de la grue : justice ordinaire et histoires spectaculaires », sur Lmsi.net. Voir aussi « Garde des enfants : des papas lésés ? » sur le site de l’Observatoire des inégalités.

 
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