Ehpad : Vous dénoncez la maltraitance ? Sanctionnées !




Comme dans la légende antique, c’est le porteur de mauvaise nouvelle que le tyran décide d’abattre. Plusieurs soignantes d’un Ehpad près de Lorient vivent aujourd’hui cette situation ubuesque.

Depuis janvier 2018, le Groupe hospitalier Bretagne Sud (GHBS) regroupe les différents hôpitaux sur le pays de Lorient dont l’Ehpad de Port-Louis/Riantec. Ces mégastructures ont été créées pour réduire les dépenses… et au passage donner les pleins pouvoirs à la direction pour appliquer des logiques purement budgétaires.

Au GHBS, cela se traduit par un sous-effectif notable dans les services et par un management fondé sur la peur, avec menaces, pressions... et maintenant mesures disciplinaires.

Ainsi, trois salariées de l’Ehpad sont actuellement sanctionnés pour « atteinte à la dignité des patients ». Que s’est-il donc passé ?

Le matin du 23 décembre 2017, l’équipe se retrouve une nouvelle fois en sous-effectif. Sophie, aide médico-psychologique, raconte : « Lorsqu’on a appelé le cadre ce matin-là, il nous a dit au téléphone : “faites au mieux”. » Cette réponse, les soignantes l’entendent trop souvent. Elle signifie « Prenez vous-mêmes la responsabilité d’une priorisation des soins. » C’est-à-dire d’effectuer certains soins et pas d’autres. « Du coup on a “fait au mieux” ; on a décidé de faire une toilette correcte à toutes les personnes et de ne pas les habiller. En revanche, on leur a donné un repas correct. » Après son service, l’équipe décide néanmoins de rédiger une fiche pour signaler les « événements indésirables » de la journée. Est mentionné le fait que les patientes et patients n’ont pas pu être habillés mais aussi, explique Sophie, dans un « item management », une « mise en cause du rôle du cadre ». C’est ce second élément que la direction ne supporte pas  : « Si on n’avait rien dit, en fait, il ne se serait rien passé. » Là, la répression s’abat.

retournement de l’accusation contre les soignantes

En mars 2018 puis en novembre, l’équipe est convoquée en entretien prédisciplinaire, avant un conseil de discipline le 9 avril 2019. « La direction nous reproche ce qu’on leur reprochait à eux », dénoncent les soignantes : une maltraitance institutionnelle provoquée par des problèmes de sous-effectif.

La situation est tellement injuste que le conseil de discipline se prononce contre des sanctions. Mais, coup de force, le directeur du groupe, Thierry Gamond-Rius, décide seul de sanctionner les soignantes : six mois d’exclusion sans salaire pour l’une, rétrogradage de 6 échelons sans ancienneté pour la seconde et avertissement pour la troisième. Parallèlement, une élue CGT au CHSCT a été rétrogradée de 6 ans d’ancienneté pour avoir mis en garde un contractuel sur le fait que travailler en dehors du cadre légal pouvait être dangereux pour sa santé comme pour celle des patientes et des patients.

À logique gestionnaire, gouvernance impitoyable : un système qui maltraite le quatrième âge et frappe les travailleuses dévouées qui s’en inquiètent ne mérite pas de vivre.

Robin (AL Lorient)

 
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