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États-Unis/Corée du Nord : Des étincelles dans une poudrière




Encore une fois, la Corée du Nord a tiré un missile au-dessus du Japon ; encore une fois, le Conseil de sécurité va se réunir ; encore une fois, Washington fulmine. Simple bluff ? On aurait tort de hausser les épaules.

Pour paranoïaque et totalitaire qu’il soit – en 2016, 120.000 détenus survivaient dans ses camps de concentration [1] –, le régime de Kim Jong-un poursuit, sur le plan international, des objectifs qui n’ont rien d’irrationnel, et qui expliquent la crise actuelle.

La caste au pouvoir est obsédée par la reconnaissance de son droit à l’existence et à la sécurité. Pour Pyongyang, le principal obstacle à cette reconnaissance est l’hostilité de la première puissance mondiale, les États-Unis. La guerre de 1950-1953 a fait 200.000 morts nord-coréens, et aucun traité de paix n’a jamais été signé, ce qui laisse toujours planer la menace d’une remise en cause du cessez-le-feu.

La stratégie de Kim Jong-un

L’objectif à court terme de Pyongyang est d’obtenir l’établissement d’un dialogue bilatéral avec Washington, qui amorcerait la reconnaissance de la légitimité de la Corée du Nord. D’où sa stratégie d’alterner les mains tendues à la Corée du Sud et les démonstrations de force nucléaire pour contraindre les États-Unis à concéder ce dialogue.

Cela signifie-t-il qu’il n’y a rien à craindre et qu’il ne s’agit là que de rodomontades diplomatiques ?

Nullement, car il y eut bien des fois, dans l’histoire, où dans une situation de tension belliciste, une guerre a pu démarrer sur un malentendu, ou un dérapage mal contrôlé.

Les pacifistes sud-coréens et japonais ont donc raison de réclamer la désescalade, la fin de la course aux armements et la rupture avec la tutelle militaire américaine qui ne font qu’alimenter un climat de suspicion à haut risque et transforment la péninsule coréenne en poudrière.

La gauche japonaise et l’extrême gauche coréenne protestent

Dans cette escalade belliciste, il faut d’ailleurs souligner à quel point la Corée du Sud est traitée comme quantité négligeable. Selon une tradition bien établie depuis les années 1990, Séoul est laissé à l’écart des tractations de crise entre Washington, Pékin et Tokyo. La Corée du Sud n’apparait que comme un secteur du dispositif militaire américain.

Considérant que la Corée du Sud est le jouet d’une rivalité inter-impérialiste qui la dépasse, une des principales organisations anticapitalistes sud-coréenne, Solidarité ouvrière [2], réclame que Séoul se dégage de l’alliance militaire avec les Etats-Unis – une alliance qui est à la fois une protection et un facteur de danger [3]. Ainsi, au printemps 2017, le déploiement par l’armée US du système antimissiles Thaad sur le territoire sud-coréen a provoqué de vives protestations et des manifestations [4].

Au Japon, le Parti communiste japonais, très social-démocrate mais résolument pacifiste – il demande la rupture de l’alliance militaire nippo-américaine – a condamné les « provocations » nord-coréennes et a souligné que le « dialogue direct » réclamé par la Corée du Nord avec les États-Unis devenait « urgent » pour entamer une désescalade [5].

L’arme nucléaire est une abomination ; Alternative libertaire est favorable à son abolition, que ce soit en France, aux États-Unis, en Corée du Nord ou ailleurs ; mais en aucun cas le programme nucléaire nord-coréen ne doit être le motif d’une guerre dont les conséquences seraient désastreuses.

Alternative libertaire, le 15 septembre 2017

[1Rapport « Corée du Nord 2016-2017 » d’Amnesty International.

[2Solidarité ouvrière (Workers’ solidarity) édite le journal Left 21 et est affiliée à une internationale trotskiste. Elle dénonce le capitalisme sud-coréen et le capitalisme d’Etat nord-coréen, imbriqué dans une dictature totalitaire.

[3Article du 31 août 2017 sur Wspaper.org

[5Dans le Akahata Shimbun, quotidien du PCJ, le 5 septembre 2017.

 
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