Gaz de schiste : Abrogations en trompe l’œil




Entre abrogation et camouflet législatif, les opposants aux gaz de schiste demeurent mobilisés. Plus que jamais, le gouvernement et l’UMP restent fidèles à leurs intérêts. L’exploration et l’exploitation des gaz de schiste, ne sont pas encore terminées.

Depuis l’interdiction, en juin dernier, des forages impliquant des fracturations hydrauliques, suivie de l’annulation en octobre de trois permis dans le Sud de la France, la question des gaz de schiste semblait résolue. En réalité, il s’agit surtout d’un effet d’annonce, par ces temps de campagne présidentielle. En Ardèche ou dans le Larzac, les habitants et les militants locaux récoltent sans aucun doute les fruits d’une mobilisation réussie ; mais la victoire obtenue est très partielle. Aux quatre coins de la France, ce sont encore 61 permis qui demeurent valides, et plus de 80 demandes qui sont en train d’être examinées [1]. Quant aux mesures votées en juin, censées garantir l’interdiction des méthodes d’exploration ou d’extraction polluantes, elles s’avèrent profondément insuffisantes et ouvrent la porte à toutes sortes de contournements. En la matière, les grandes entreprises pétrolières ou gazières font preuve d’une imagination débridée. Par exemple, les fracturations au propane ou à l’air comprimé pourraient fort bien être substituées à la fracturation hydraulique : alors même que l’impact environnemental est à peu près équivalent dans tous les cas, la loi ne prévoit actuellement aucune sanction contre ce genre de pratiques.

[*La chèvre et le chou*]

Comme en témoigne la récente déconfiture du projet de loi déposé par le PS et EELV demandant l’interdiction pure et simple de l’exploration et de l’exploitation des gisements d’hydrocarbure non-conventionnels [2]. Le gouvernement est soucieux de ménager la chèvre et le chou : d’un côté, apaiser les populations locales à grand renfort de mensonges ; de l’autre, donner des gages sonnants et trébuchants aux entreprises, qui refusent de renoncer aux profits tant espérés. Du reste, même les rares et timides mesures prises ces derniers mois incluent des clauses de remboursement, très avantageuses pour les sociétés détentrices de permis [3]. Plus grave encore, ces entreprises ne s’avouent pas vaincues. Dans un premier temps, elles vont continuer leurs travaux sur les nombreux sites où elles le peuvent encore, en recourant à des techniques tolérées. Mais à terme, elles n’excluent pas de réhabiliter la fracturation hydraulique, en tablant sur l’essoufflement des collectifs et des populations locales.

Dans ces conditions, la mobilisation doit plus que jamais se poursuivre. Et dans les faits, c’est bien le cas, malgré le silence relatif des principaux médias. Le 23 octobre deux manifestations ont ainsi réuni plusieurs milliers de personnes, à la Ferté-sous-Jouarre (Seine-et-Marne) et à Barjac (Gard). Par ailleurs, dans les nombreuses localités menacées, réunions et rassemblements de protestation continuent d’avoir lieu régulièrement, avec succès. Même là où les permis ont été abrogés, les habitants et les habitantes savent que tout danger n’est pas écarté. Par exemple, malgré les grandes déclarations sarkozystes, la région emblématique de Villeneuve-de-Berg [4] est encore cernée par des permis toujours en vigueur, qui concernent la partie méridionale de l’Ardèche et une portion du Gard (bassin alésien). Or, la pollution des nappes phréatiques n’a pas beaucoup de respect pour la délimitation administrative. Le mouvement de révolte s’essouffle un peu mais il n’est pas dit que la lutte en reste là. Devant les demi-mesures du gouvernement en reconquête électorale, les populations décideront peut être de passer à une occupation sans condition des lieux de gisements au mépris des lois [5].

Commission écologie

[1Comme le rappelait par exemple le communiqué de presse des collectifs locaux, après leur réunion du 6 novembre 2011.

[2Le projet de loi, examiné le 6 octobre 2011, a été rejeté par les député-e-s, essentiellement UMP

[3Par exemple, la fixation du niveau de dédommagement ne tient pas compte de l’avancée précise des travaux effectivement réalisés par les sociétés.

[4Pour rappel, cette commune de 2 800 habitants avait accueilli, au printemps 2011, plus de 10 000 manifestants et manifestantes.

[5Ce sont là les termes de la déclaration de Jose Bové au dernier rassemblement de Barjac en Octobre.

 
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