Ecologie

Plan écophyto : Il n’en restera même plus le symbole




Le gouvernement français a prétendu répondre à la colère des agriculteurs en annonçant la fin du plan écophyto qui visait à la réduction de l’usage de produits phytosanitaires. Mais qu’est-ce que c’était que ce plan écophyto ? Et que peut-on tirer de son annulation ?

Le plan écophyto 2018 (ou Ecophyto I) est une mesure de 2008 qui visait à réduire de moitié l’usage de produits phytosanitaires en dix ans. Il a été le sujet de conflits importants entre, d’un coté, des associations environnementales et la Confédération paysanne et, de l’autre, le lobby agro-industriel avec la FNSEA en tête. Cette bataille législative a été « remportée » par le camp écologiste qui a pu bénéficier du Grenelle de l’environnement pour imposer sa vision et ses objectifs.

En effet, une telle réduction ne peut être que le résultat d’un changement de système faisant perdre aux produits phytosanitaires leur place centrale dans l’agriculture française. Cette vision s’oppose radicalement à celle la FNSEA qui évoquait une utilisation de pesticide déjà « raisonnée » et dont il fallait surtout mitiger les effets. Cette victoire des objectifs s’est cependant heurtée au mur des moyens. Les deux mesures phares sont la création du réseau Déphy, un réseau de fermes pilotes qui pourraient servir de modèle de transition vers le zéro phyto, et le bulletin de surveillance végétal (BSV) chargé de mieux informer les agriculteurs.

Ce premier plan écophyto a été un échec avec une augmentation de 20% d’usage de phytosanitaires ! Fort de cette leçon, le gouvernement choisi donc de mettre en place une mesure contraignante pour son plan écophyto II en 2015 : un nouveau marché, le Certificat d’économie de produits phytosanitaires (CEPP). L’idée est que chaque fournisseurs de phyto mène des actions pour en réduire l’utilisation afin de générer des certificats qui sont échangeables entre structures. Cette mesure devait permettre de réduire de moitié les pesticides pour 2025.

Un fiasco total

En 2023, les indicateurs en matière de pesticides sont au même niveau que 2009. La loi Egalim, effective depuis 2021, a en effet supprimé ce dispositif en séparant le conseil de la vente. À la place, la loi cherchait à favoriser l’agro-écologie à travers les marchés publics mais là aussi, c’est un échec : seul 20% de la restauration collective a atteint la qualité souhaitée contre les 50% affichés.

En 2024, le fiasco est total. Il est difficile de tirer des conclusions définitives tant le ratage est énorme et relève parfois de l’incompétence pure. On peut par contre attribuer cette incompétence à l’approche de communicant qu’à le gouvernement à l’égard de ­l’écologie et expliquant, en partie, le manque de moyens. On peut y voir aussi un manque de compréhension ou de volonté politique par rapport au jeu d’acteur de l’agriculture : aucune mesure prise concernant la concurrence des marchés internationaux ou des chaînes de distribution qui possèdent le pouvoir économique.

Nous pouvons surtout tirer la leçon du monopole technique qu’exercent les pesticides dans l’agriculture en France. Ce n’est pas sujet isolé mais c’est l’un des piliers de l’agro-industrie autour duquel elle organise son activité. Les objectifs des plans revêtent alors un caractère symbolique. Combattre les pesticides, c’est combattre un lobby puissant et organisé en France. Le prochain plan sera vraisemblablement un échec à son tour car, dans une telle situation, les contradictions du capitalisme apparaissent plus fortes que jamais : il est impossible de ménager à la fois le capital et notre santé.

Corentin (UCL Kreiz-Breizh)

 
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