Allemagne : Cogestionnaires contre le droit de grève




Face à l’évolution du paysage syndical en Allemagne, le gouvernement prépare une loi pour limiter le droit de grève... avec le soutien de la plus grande confédération syndicale du pays.

Après les grèves en 2010 dans le secteur du chemin de fer organisé par le syndicat GDL (en majorité des agents de conduite, environ 80 % des conducteurs de train), qui ont été assez efficaces, le patronat et la grande conféderation syndicale DGB ont demandé une loi qui limite le droit de grève des syndicats minoritaires dans le transport et dans le secteur de la santé. Cette loi devrait interdire de contester une convention collective signée par un syndicat majoritaire. Depuis une décennie, dans le secteur du transport (chemin de fer et transport aérien) existent des syndicats catégoriels à côté des syndicats du DGB, confédération syndicale dominante depuis la naissance de la RFA en 1949. Ces petits syndicats ont mené plusieurs grèves qui ont changé le paysage syndical grâce à leur efficacité (en bloquant le trafic aérien et du rail pendant plusieurs jours). Ces grèves cheminotes ont créé une situation assez inhabituelle en ­Allemagne. Contre cette alliance du patronat et du DGB pour limiter le droit de grève, il existe une vaste opposition parmi des syndicalistes de base, y compris dans le DGB, surtout chez le grand syndicat du service public, ver.di. Mais le nouveau gouvernement social-démocrate (SPD) et chrétien-démocrate (CDU) a promis au patronat de proposer une loi en octobre 2014. La direction de ver.di, sous la pression de la base, a changé sa position en critiquant ouvertement cette tentative de limiter le droit de grève.

Pour les libertés syndicales

Récemment, en août et septembre 2014, le GDL a mené des grèves assez courtes (deux et trois jours) pour une augmentation des salaires de 5 % et la réduction du temps de travail à 37 heures. Elles ont été très suivies par le personnel roulant chez la Deutsche Bahn, la compagnie ferroviaire nationale. Le syndicat majoritaire EVG, membre du DGB, a ouvertement critiqué ces grèves et s’en est désolidarisé. Le chef du DGB a publié une lettre ouverte où il demande au gouvernement d’accélérer cette loi pour empêcher de telles grèves. La plupart des médias critiquent aussi très violemment ces grèves au nom des pauvres usagers et des effets sur l’ économie. Depuis, un an, il s’est constitué un comité pour les libertés syndicales composé par des syndicalistes de base, des militants du DGB, des non-syndiqué-e-s, et aussi des avocats connus et respectés, qui agissent pour empêcher cette loi antigrève. Ce qui manque dans ces moments de grèves et de luttes, c’est une activité plus offensive des grévistes envers les usagers, parfois en colère, pour les éclairer sur la situation du chemin de fer et les conditions de travail pénibles.

Willi Hajek (membre du TIE, réseau allemand des syndicalistes de base)

 
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