Culture

Halloween : fête populaire ou impérialisme culturel




Halloween, simple produit du soft power états-unien ? Cette dimension est incontestable et certains pays comme le Venezuela ont même interdit la fête. Tout comme notre Noël actuel est très américanisé, c’est à coup de films et séries qu’Halloween s’est diffusé. En France c’est à l’occasion d’un coup marketing de France Télécom en 1997 que la fête s’implante, d’abord auprès des jeunes adultes.

L’attrait dura quelques années puis on note une baisse d’intérêt dans les années 2000, l’effet de mode aura été bref. Et pourtant non, la fête est bien là et s’est même finalement ancrée discrètement. Par la culture enfantine d’abord, avec le porte à porte déguisé dans les zones pavillonnaires, mais également dans les grandes villes : soirées déguisées, bar décorés, fêtes étudiantes, soirées cinéma, sur lesquelles l’industrie du divertissement et le merchandising se sont empressés de surfer. Aurions-nous été bêtement américanisées par la force ?

Pas vraiment. Car même en étant bombardé d’épisodes de Thanksgiving dans les séries américaines, on ne s’est pas mis à fêter Thanksgiving pour autant, la fête n’ayant aucun sens ici. En revanche Halloween « convoque un univers horrifique pop qu’on partage » [1] et fait le lien avec la Toussaint.

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Rite païen derrière la façade capitaliste

Mais Halloween a une histoire populaire : ancienne fête celte de Samain qui fut christianisée, elle se fêtait autour de l’équinoxe d’automne qui était la nuit où la frontière entre les mortes et les vivantes s’atténuait. La fête d’Halloween s’est ensuite exportée aux États-Unis, essentiellement via les deux millions d’immigrées irlandaises qui quittèrent l’île suite à la grande famine de 1845, aggravée par l’emprise coloniale britannique.

Les irlandaises constitueront l’essentiel du prolétariat industriel des villes du nord au XIXe siècle, méprisées et discriminées. Les jack o’lanterns passeront du navet aux citrouilles américaines et la fête se popularisera après la Guerre de sécession. Dans les années 1910-1920, Halloween sera l’occasion pour les jeunesses ouvrières de se livrer à des actes de vandalisme, qui iront jusqu’à des incendies de maisons.

Afin d’atténuer ces manifestations de révoltes, on popularisera les défilés bon enfant, déguisées avec le fameux « Trick or treat  ! ». Il reste de cette période révoltée la tradition de jeter des œufs et du papier toilette sur certaines maisons. Notons que sans connaissance de cette histoire, en France un siècle plus tard entre 2015 et 2020, la fête d’Halloween sera de même l’occasion de scènes épisodiques de vandalisme dans les quartiers populaires.

Dès lors, peut-être pouvons-nous nous la réapproprier dans un sens subversif plutôt que mercantile ?

Nico Pasadena (UCL Montreuil)

[1Chaîne YouTube Bolchegeek, « En finir avec Noël », décembre 2019.

 
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