Front de gauche : L’impossible réformisme ?




À l’heure où se prépare l’élection européenne de juin prochain, quels enseignements tirer des tentatives électorales des courants réformistes de gauche ?

Le PCF a occupé, de manière quasi-exclusive, de 1945 jusqu’en 1988, le terrain électoral d’un réformisme conséquent, appelant à la construction progressive d’une société socialiste.

Par la suite, la candidature Juquin, ancien dirigeant du PCF, va susciter en 1988 une vraie dynamique à travers des comités de soutien qui finiront en eau de boudin, pour les mêmes raisons que les comités de campagne contre le Traité constitutionnel européen (TCE) plus tard ne déboucheront pas : les seuls accords possibles entre les réformistes cohérents et les révolutionnaires qui investissent le terrain électoral ne peuvent être que ponctuels.

Les recompositions des années 2000

Mais l’idée taraude les milieux militants de la génération 68 d’autant que les perspectives révolutionnaires semblent s’éloigner [1].

En 2002, le PCF se retrouve au milieu d’un champ de ruines, son candidat se retrouvant derrière celle de LO et celui de la LCR ! La direction de la LCR se lance alors dans l’aventure du NPA. Elle espère faire déboucher à gauche le projet d’un nouveau parti qui se cherche dans les milieux militants depuis 1995, avec d’un côté l’apparition des « mouvements sociaux » lors de la grève et de l’autre les 5 % de LO aux présidentielles.

Le succès initial du NPA rend la riposte urgente pour la gauche réformiste : Mélenchon accélère sa rupture avec le PS pour créer le Parti de gauche (PG) qu’il dirige d’une main de fer et le PCF trouve enfin un leader pour les présidentielles à venir. Le Front de Gauche (FdG) est né.

La direction du NPA, issue de la LCR, est (plus ou moins secrètement) profondément divisée sur le projet politique du NPA. S’agit-il d’un parti révolutionnaire habilement relooké et utilisant la tribune offerte par les élections, ou s’agit-il de conquérir des places d’élus dans les institutions pour construire et diriger un projet réformiste cohérent, qui serait le seul possible dans une période de reflux des luttes ? Les échecs électoraux du NPA vont faire éclater ces contradictions et le parti avec, plusieurs courants issus du NPA se retrouvant au final sous le toit commun des réformistes du FdG
 [2].

Entre réformisme et réalisme

Mais le FdG est parfaitement instable. Non seulement parce qu’il est le terrain de jeux d’égo démesurés. Mais plus fondamentalement à cause du réalisme électoral qui oblige pour avoir des élus, au-delà des postures et proclamations, de finir par passer alliance avec le PS, sinon dès le premier tour comme le PCF aux municipales, au moins pour le second tour pour tous les autres ! C’est à cet instant précis que le FdG trébuche, lâche la ligne d’un réformisme cohérent et perd la confiance de celles et ceux qui ont bien compris qu’aucune alliance n’est possible avec le PS qui défend le capitalisme aussi bien qu’un parti de droite.

Une fois passée l’épreuve de force interne pour la composition des listes aux européennes, le FdG va peut-être retrouver un peu de souffle le temps d’une élection européenne qui, se jouant sur un seul tour, permet d’oublier la question du second tour. Mais le problème reste entier et insoluble : pas ou bien peu d’élus sans accord avec le PS !

Jean-Yves (AL 93)

[1Le PSU puis les Les Alternatifs seront au final toujours satellisés par le PCF via les élus locaux dans les listes d’union dirigées par le PCF.

[2Ce qui n’exclut pas pour certaines et certains militants la croyance dans la construction d’une fraction « révolutionnaire » au sein du FdG selon une certaine orthodoxie trotskyste.

 
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