Pleins Feux

Éducation nationale : Avec Gabriel Attal c’est le retour de la méthode Blanquer !




Avec la nomination de Gabriel Attal, le bon élève de la Macronie, au ministère de l’Éducation nationale nous envisagions le pire… et, de suite, nous n’avons pas été déçues ! C’est encore et toujours une vision archaïque et passéiste de l’école qui fait la part belle aux fantasmes de la droite et de l’extrême droite. Évaluations, uniformes, nationalisme et laïcité de façade, cachant une véritable islamophobie, sont au rendez-vous.

Tout au long de ses cinq années en tant que ministre lors du premier quinquennat de Macron [1], Blanquer a lacéré l’Éducation nationale par ses réformes autoritaires et libérales. Ensuite, pendant un an l’exercice de Pap Ndiaye, bien que mené sous un dogme managériale identique, a donné une petite pause aux personnelles, notamment en se démarquant de son prédécesseur en déliant son action de l’influence de l’extrême droite. La nomination de Gabriel Attal le 20 juillet 2023 annonce le retour de la méthode et des lubies de Blanquer à ce ministère.

Le message envoyé par Macron et Gabriel Attal pour la rentrée scolaire 2023 est clair : le problème de l’Éducation nationale n’est pas le manque criant de moyens et d’enseignantes (1 433 postes non pourvus pour cette rentrée), ni l’absence d’une réelle ambition de lutte contre la société validiste avec une école qui se donne les moyens d’être réellement inclusive, ni l’amélioration des statuts désastreux des collègues AED [2], AESH [3] (en grande majorité des femmes) et autres personnels techniques et administratifs dont l’augmentation des salaires ne va même pas rattraper l’inflation – par exemple les collègues AESH plafonnent à des salaires inférieurs à 1.000 euros du fait d’une grille salariale défavorable et des temps partiels imposés – , ni encore les galères financières des familles des quartiers populaires touchées par l’inflation et l’augmentation des coûts scolaires, de logements ou de l’alimentation.

Non qu’on se le dise : pour la bourgeoisie libérale le problème serait de restaurer l’ordre après les émeutes urbaines suite à l’assassinat de Nahel par la police et donc de forcer les classes populaires à rester plus longtemps au sein de cette école qui demeure, par manque de moyens, inégalitaire. Le danger serait aussi la remise en cause de la laïcité et donc l’impérieuse nécessité d’interdire... l’abaya (67 refus de « se conformer à la règle » ) stigmatisant ainsi les élèves de confession musulmane ou supposées l’être et démontrant une nouvelle fois la volonté de contrôler le corps des femmes, l’interdiction de l’équivalent masculin, le quamis, s’étant ajouté par la suite.

Un ministre qui flirte de nouveau avec l’extrême droite

Pourtant si on veut évoquer une mesure simple et forte en terme de laïcité, il suffirait de regarder du côté des écoles privées, en effet l’enseignement privé sous contrat, majoritairement catholique, regroupait à la rentrée 2022 plus de 2 millions d’élèves, soit 17,6 % des effectifs scolarisés, dans un peu plus de 7.500 établissements et qui accaparent au travers de ses 8 milliards d’euros d’agent public selon le premier rapport de la cour des comptes remis en juin 2023 [4] sans parler du concordat en Alsace-Moselle. Comme on peut l’observer, Attal ouvre son mandat par une mesure islamophobe en visant les élèves de confession musulmane, ou supposées l’être, se positionnant sous l’influence directe des idées nauséabondes de l’extrême droite (telle que par exemple la stratégie d’entrisme zemourienne dans les associations de parents d’élèves, voir article ci-dessous).

Le libéralisme débridé au service d’une pédagogie autoritaire

En poursuivant la mise en œuvre du « pacte enseignant » [5], outil managérial de détricotage des statuts et de mise en place de la contractualisation et de la subordination du métier d’enseignant à la hiérarchie, Attal montre sa volonté de prolonger les attaques libérales sur l’école. Depuis l’élection de Macron en 6 ans c’est plus de 8.000 postes de profs qui ont été supprimés en parallèle de l’accueil de plus de 20.000 élèves en plus dans le second degré public.

En imposant la mise en place de nouvelles évaluations nationales en CM1 et en 4e c’est la culture de l’évaluation et de la compétition qu’Attal compte renforcer au sein de la « start-up éduc’nation ».
Et dans la fièvre de cette rentrée tapageuse, l’artisan de la mise en œuvre du SNU (Service national universel) compte poursuivre le projet de Pap Ndiaye d’introduire le militarisme et le nationalisme le plus crasse au sein des lycées en créant une semaine dite « de cohésion » qui permettrait au élèves de seconde de faire, sur temps scolaire, une partie du SNU. Et cerise sur le gâteau, les enseignantes pourraient y participer au travers du PACTE...

On n’oublie pas non plus l’attaque majeure contre les élèves des classes populaires avec la réforme du lycée professionnel qui va voir l’exposition des jeunes à l’exploitation par les entreprise par une plus grande présence en stage, et la diminution des temps d’enseignement au sein des lycées pros [6]

La colère pourrait rapidement gronder

Mais il ne faut pas se méprendre, le gouvernement sort d’une séquence de mouvement social sur les retraites, où certes il a su imposer sa réforme, mais où il a perdu considérablement en assurance et en crédibilité. Les personnels de l’Éducation nationale ont su jouer un rôle dans cette période, et les ferments de la combativité pourraient bien continuer de croître et constituer un beau grain de sable dans les rouages de la Macronie. Pour cela les syndicalistes ont pu observer l’affluence notables des collègues venus en nombre aux heures d’informations syndicales de juin pour décrypter les enjeux de la mise en place du PACTE qui fait gronder les salles des personnels.

Vous avez dit laïcité ? Laurent n’a pas bien entendu...

La jeunesse a certainement aussi son mot à dire concernant la volonté de mise au pas avec le SNU, et les perturbations des villages SNU lors de la tournée de la caravane laisse penser que ce n’est pas tout à fait joué pour le nouveau tandem SNU, Prisca Thévenot - Gabriel Attal [7]

Nous communistes libertaires, nous défendons au contraire un changement de société et l’avènement d’une école émancipatrice qui donne les moyens aux élèves de s’outiller pour mener les luttes contre toutes les discriminations, qu’elles soient sociales, raciales, de genre ou de handicap. Cela passe par la popularisation au sein de nos équipes pédagogiques des apports des pédagogies critiques et libertaires, par le développement de pédagogies émancipatrices et coopératrices. Cela passe également par le renforcement de nos outils syndicaux et la construction de collectifs de lutte au sein des établissements.

La Classe Buissonnière

Classe buissonnière regroupe les
travailleuses et travailleurs de
l’éducation de l’UCL.

[2AED : assistantes d’éducation, ils et elles encadrent et surveillent les élèves au sein des collèges et des lycées.

[3AESH : accompagnante d’élève en situation de handicap, accompagnent et apportent en classe un soutien aux élèves en situation de handicap ou à besoins éducatifs particuliers.

[4« L’enseignement privé sous contrat », rapport disponible sur le site de la Cour des comptes, www.ccomptes.fr

[5« pacte enseignant » : ensembles de mesures sensées revaloriser et « moderniser » le métier d’enseignante proposées aux enseignantes volontaires consistant essentiellement en l’acceptation de missions supplémentaires servant à pallier les manquements de l’institution, notamment le remplacement de collègues absentes.

[6« Lycée professionnel : La tronçonneuse Blanquer », Alternative libertaire, n°286, septembre 2018.

[7« Non au service national universel ! », Communiqué de l’UCL, 21 juillet 2022, sur www.unioncommunistelibertaire.org.

 
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