CGT-Métallurgie : Vers un syndicalisme d’expertise ?




Une combativité pas négligeable, mais pas de projet anticapitaliste pour enrayer la désindustrialisation… La fédération CGT de la métal­lurgie donne parfois l’impression de vouloir « conseiller les décideurs ». Ce n’est pas notre rôle !

Ambiance mitigée au 41e congrès de la fédération CGT de la Métallurgie, qui s’est tenu du 20 au 24 novembre à Dijon. Sur les 485 délégué.es attendu.es, seul.es 390 ont fait le déplacement. Une faible participation qui témoigne du manque
d’investissement de nombreux syndicats dans la vie fédérale. Le document d’orientation a d’ailleurs été très peu amendé. La fédération espère améliorer la participation, à l’avenir, en renforçant la formation syndicale, et incite les élu.es et mandaté.es à à utiliser au moins 50 % de leur temps de décharge pour s’activer hors de l’entreprise, que ce soit au niveau fédéral ou interpro.

Beaucoup de syndicats pèchent en effet par un localisme excessif, le repli sur leur boîte… qui pourtant ne fonctionne pas en autarcie !

L’ensemble de la branche métallurgie est ainsi menacée par la mise en place d’une convention collective particulièrement régressive, qui pourrait ensuite inspirer d’autres branches. Elle prévoit notamment la mise en place de la « quotation au poste » qui permettrait à l’employeur de payer les salarié.es non plus en fonction de leur savoir-faire et de leur expérience, mais en fonction de la nature de la tâche. C’est donc clairement ouvrir la possibilité de baisses de salaire au gré des changements de postes. La fédération a manifesté le 13 octobre pour peser sur la négociation, en liant cette mobilisation à la lutte plus générale contre les ordonnances Macron.

Dans le mouvement contre la loi Travail, en 2016, la CGT-Métallurgie s’était montrée assez combative, en incitant fortement ses syndicats à organiser des grèves et à oublier un peu de siéger dans les instances paritaires pour participer à des actions de blocage.

Lutte des classes ou « croissance » ?

Lors du discours d’ouverture du congrès, le secrétaire fédéral, Frédéric Sanchez, a prôné une « société plus juste » par le « dépassement du capitalisme ». Dans une posture très internationaliste, il a convoqué la Grèce, le Brésil, l’Argentine la Turquie, l’Inde ou l’Italie pour conclure que « quel que soit le pays, les aspiration à lutter contre le capitalisme sont les mêmes ». Il a également insisté sur l’importance de l’accueil des travailleuses et travailleurs migrants. En revanche, lorsqu’il a appelé à une défense pied à pied de la Sécurité sociale, on n’a pu s’empêcher de
s’interroger : dès la 2e page du cahier de congrès, on trouvait une pub pour des assurances… qui justement ont intérêt au recul de la Sécu !

Les textes du congrès sont par ailleurs assez déconnectés de la combativité exprimée en 2016. Consensuels, peu revendicatifs, ils ne témoignent pas d’une grosse ambition sur la transformation sociale et écologique de la société. Au contraire, ils multiplient les références à la « croissance » et au « pouvoir d’achat »… mais ne citent pas une fois la lutte des classes. Ils rejoignent également une tendance de la fédération à s’investir dans un rôle d’expertise syndicale – une caractéristique du recentrage de la CFDT dans les années 1980. Un peu comme lors des Assises de l’industrie, une initiative tenue par la CGT en février dernier, on va donc prodiguer des « conseils » sur les investissements publics, la recherche, la stratégie industrielle… Mais conseiller les décideurs, est-ce que ça a du sens pour une organisation syndicale, tant que l’industrie reste, de toute façon, la propriété privée des capitalistes ? [1]

Bernard (AL Auvergne)

[1Voir le tract d’AL a produit à l’époque : « Pour relocaliser l’industrie : qu’elle change de mains », sur Alternativelibertaire.org

 
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