Israël : L’autre face de la politique de Sharon




Alors que la politique criminelle de Sharon compromet, malgré les « plans de paix » actuellement en négociation, un règlement juste du conflit israélo-palestinien, Israël a vécu le 3 novembre dernier une grève nationale de grande ampleur contre les réformes libérales du gouvernement. La politique coloniale de Sharon a en effet pour pendant l’ultralibéralisme du ministre des finances Benyamin Netanyahu qui applique à la lettre les politiques d’austérité de son « modèle », Margaret Thatcher.

Ce mouvement de grève entendait protester contre les projets d’annulation unilatérale des conventions collectives, contre la décision du gouvernement de prendre le contrôle des caisses de retraite des employé(e)s des services publics, en partie gérés jusqu’à maintenant par la Histadrout (la centrale syndicale unique) selon le modèle travailliste qui n’est par ailleurs pas un exemple de transparence, et s’opposer à un millier de licenciements prévus dans les services publics. Israël traverse en effet une véritable crise économique et la politique gouvernementale d’austérité a accru la pression, non seulement sur les couches les plus dévaforisées mais également sur les classes moyennes.

Le prix de l’occupation

La politique économique du Likoud (parti majoritaire au pouvoir, droite extrême) correspond en tout point aux critères du libéralisme le plus débridé, utilisant tous les moyens « classiques » déjà utilisés dans la plupart des pays occidentaux : réduction des budgets des ministères ce qui affecte les services pour la population, baisses des aides sociales, augmentation des frais de santé, avec comme argument la relance de l’économie en récession et la lutte contre le déficit budgétaire.

Le chômage avec plus de 270 000 demandeurs d’emplois touche 11 % de la population active. Les arabes, les nouveaux immigrants et les femmes sont les premières victimes de cette situation.

Des secteurs entiers de l’activité économique sont touchés de plein fouet. Dans la construction, l’absence prolongée de 50 000 ouvriers palestiniens, due au bouclage des territoires, a fait cesser plusieurs milliers de chantiers, de nombreuses petites entreprises sont en faillite. L’activité touristique a connu une chute vertigineuse avec une baisse de 64 % de la fréquentation entraînant des licenciements massifs et la fermeture d’établissements en tout genres : hôtels, restaurants, compagnies de transports, blanchisseries, agences de voyages. Le textile et l’habillement sont aussi très touchés, ce secteur a vu ses ventes chuter avec à la clé plus de 4 000 licenciements et des délocalisations vers la Jordanie, l’Égypte ou encore le Sri Lanka.

Dans l’agriculture, l’absence de dizaines de milliers de travailleurs journaliers palestiniens lors des récoltes de ces trois dernières années a engendré d’énormes pertes pour les moshavim et les kibboutzim. Tout secteur confondus, il faut prochainement s’attendre à des vagues massives de licenciements qui pourraient toucher plus de 100 000 travailleur(se)s.

Sur la radio de l’armée, le général Gabby Ashkenazy a déclaré que 20 % des jeunes appelés de 18 ans venaient de foyers touchés par la pauvreté. Certains d’entre eux, affectés dans des unités proches de leurs domiciles en raison de leurs difficultés économiques, continuent d’effectuer des petits boulots pour augmenter leurs revenus. Pour donner le change, face à cette déroute, le gouvernement procède à de « grands travaux » dans tout le pays pour parait-il enrayer le chômage et attirer les investisseurs.

Quelle solidarité de classe ?

Le front social israélien est loin d’être passif et se manifeste par des mouvements de grèves dans un contexte ou domine le consensus autour des impératifs de « sécurité nationale » synonymes de guerre contre les Palestinien(ne)s. La grève générale décrétée le 3 novembre par la Histadrout a d’ailleurs été limitée par décision du Tribunal du travail israélien à une « grève de protestation de quatre heures ». Des débrayages et des arrêts de travail se sont succédés toute la journée, entraînant la fermeture des services publics et des banques, la paralysie du trafic ferroviaire et du trafic aérien à l’aéroport international Ben-Gourion près de Tel-Aviv, le blocage de l’approvisionnement en carburant des stations-services.

Il est évident que ce sont l’occupation et l’intense pression militaire sur la Palestine qui pèsent sur les autres budgets. Cependant, les mouvements sociaux et les grèves des travailleur(se)s israélien(ne)s ne font pas le lien avec la situation subie par la population palestinienne et l’occupation. Même la critique, minimale parce que ne portant pas atteinte aux fondements du colonialisme israélien, du « coût exorbitant de l’occupation pour les travailleur(se)s » n’est pas portée dans les luttes ouvrières.

La Histadrout doit en théorie reverser les cotisations syndicales des Palestinien(ne)s travaillant en Israël (qu’elle perçoit après un prélèvement direct sur les salaires) au PGFTU (Palestinian General Federation of Trade Union, le syndicat palestinien), néanmoins, la centrale syndicale palestinienne attend toujours...

De leur côté les Palestinien(ne)s sont plongé(e)s dans la misère et près de 90 % d’entre eux/elles vit en dessous du seuil de pauvreté. Ce sont les premières victimes de la politique israélienne, cependant une des clés du conflit réside dans la naissance d’un front intérieur contre le colonialisme, dans lequel le prolétariat israélien peut avoir un rôle primordial.

Ngoc

 
☰ Accès rapide
Retour en haut