Loi de décentralisation : Les pièges de la métropolisation




Les textes de loi portant « nouvelle organisation territoriale de la République » prévoient de nombreux transferts entre les différentes collectivités (régions, départements, EPCI [3], communes et métropoles) et l’État. Mais il s’agit plus de la concentration du pouvoir dans les grandes villes.

Les supporters des lois sur l’organisation territoriale les présentent comme un nouvel acte de décentralisation de l’organisation territoriale, administrative et économique. C’est un mensonge. Nous reprenons ici les termes utilisés par l’Union syndicale Solidaires : il s’agit d’une délocalisation de la centralisation. La métropolisation, notamment, illustre cela.
Renforcer les pouvoirs de l’État n’a jamais été une garantie pour défendre les services publics. Sans même entrer dans le débat sur la définition de ces services publics, qu’on pourrait renommer « les productions et services socialement utiles », il faut rappeler que c’est bien l’État qui prive les services publics des moyens nécessaires à leur fonctionnement, qui les détruit, qui les privatise lorsque la classe dominante le juge utile. Ajoutons que la démocratie sociale n’a jamais été une caractéristique des services de l’État, tant en interne que vis-à-vis des usagers.

Délocalisation
de la centralisation

Parce que nous partageons ­l’analyse concluant sur une délocalisation de la centralisation, l’angle d’attaque adopté par certaines organisations syndicales et politiques sur « l’affaiblissement des pouvoirs de l’État » nous paraît erroné. Historiquement, l’État a connu plusieurs adaptions de son organisation, conséquences du rapport de forces entre les classes sociales aux intérêts différents. En l’occurrence, il n’y a pas d’affaiblissement de l’État ; celui-ci s’organise autrement, à partir d’un nombre de régions plus réduit et aux compétences renforcées [1]. Pour nous il ne s’agit pas de combattre un hypothétique « désengagement de l’État », mais l’adaptation de ses structures et de son fonctionnement aux actuels besoins du capitalisme.

Le nombre et le découpage des régions, les conseils généraux, transformés en conseils départementaux, sont des sujets sur lesquels nombre de politiciens ont des avis, même s’il est souvent limité à la défense de leur pré carré. Un sujet essentiel est peu évoqué : celui de la métropolisation, qui est un des axes essentiels de cette réorganisation étatique.

Les lieux de décision seront encore plus éloignés de la population. Des collectifs alertent ­d’ores et déjà que les intercommunalités, dont les pouvoirs sont renforcés et qui ne sont pas élues au suffrage universel, seront aux mains de l’exécutif de la ville la plus importante. De quoi renforcer le désintérêt pour les élections, y compris chez les personnes non motivées par une éventuelle abstention révolutionnaire ! Le transfert des compétences des conseil généraux accentue le pouvoir des maires des métropoles, affaiblit celui de la majorité d’entre eux. D’ailleurs, les collectivités qui n’appliqueraient pas avec zèle les directives concernant les regroupements et les suppressions d’emplois publics seront pénalisées financièrement. C’est bien « la loi républicaine » qui prévoit ces sanctions envers des « élus du peuple » !

Exigences patronales

La métropolisation était une revendication du Medef [2]. Comme bien d’autres exigences patronales, le gouvernement s’empresse de la satisfaire. Le patronat et les institutions capitalistes ont besoin de la métropolisation et de régions plus étendues ; que cela affaiblisse encore le peu d’espaces démocratiques dans la société, accentue les inégalités et condamne ­l’avenir de zones entières du territoire et de leurs populations ne compte pas pour les serviteurs du capitalisme.

Christian (AL Transcom)

[12. Il faut toutefois noter que l’appareil répressif (armée, police, justice…)
n’est pas touché par les transferts
de compétences entre entités administratives ; il demeure aux mains
de la structure centrale de l’État.

[2Voir par exemple la synthèse
« Ancrer l’entreprise dans les territoires » sur le site : france2020medef.files.wordpress.com

[3Communautés de communes, communautés d’agglomération.

 
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