Répression : C’est quoi une police de gôche ?




Si Sarko, Guéant, Hortefeux et consorts ne sont plus au pouvoir, le très droitier Valls est aujourd’hui le maître de la place Beauvau. Force est de constater que la gauche gouvernementale n’a plus aucun complexe sécuritaire et assume pleinement son goût pour les uniformes.

Qui peut aujourd’hui sérieusement affirmer que le sécuritaire est l’apanage de la droite ? La gauche gouvernementale et parlementaire a pleinement réussi sa mue idéologique sur la question depuis le colloque de Villepinte en 1997. Le PCF appelle dans son programme aux présidentielles à augmenter les effectifs de la police. Malgré ses poses de superflic, Sarko n’avait pas tenu ses promesses sur ce terrain et la gauche le lui rappelle bien : même en temps de crise, s’il est bien un ministère qui ne sera pas touché, c’est bien celui de l’Intérieur. Mais on pourra objecter que la police de gauche, ce n’est pas la même : c’est une police de proximité ! C’est même pour cela que l’on créé des zones de sécurité prioritaires (ZPS) pour être encore plus proche des gens, c’est ça être de gauche, vouloir se rapprocher du peuple. Au point que lorsque le sinistre Hortefeux créa une brigade spéciale à Belleville pour lutter contre les biffins et les sans-papiers, les élu-e-s socialistes manifestèrent leur mécontentement, la brigade n’intervenant pas 24 heures sur 24 [1]. Il y a peu, un jeune militant communiste m’affirmait sans rire que « le peuple, les prolétaires vivent dans l’insécurité, il faut les écouter, il faut plus de flics ». Plus de flics, juste par solidarité avec le peuple, c’est ce qui s’appelle de l’abnégation. Pour cette gauche, lutter contre la casse des services publics revient à construire plus de commissariats. Évidemment, c’est uniquement pour rétablir l’ordre républicain, pas pour encadrer les dominé-e-s.

[*La mue sécuritaire du PS*]

D’ailleurs, les rafles de Rroms opérées cet été, ce n’est pas du racisme d’Etat, c’était le juste respect de décisions de justice (même si comme à Evry, la ville de l’élu Valls, la police avait semble-t-il quelque peu anticiper une décision de justice un peu longue à venir). Sous Sarko, c’était par xénophobie, aujourd’hui c’est par respect de la loi républicaine – et à bien y réfléchir, où irions nous sans la loi républicaine, ce serait l’anarchie !

C’est sans doute également pour rétablir l’ordre républicain que début juillet des flics ont débarqué dans des locaux syndicaux à Poitiers. Il faut dire que ces méchants syndicalistes avaient osé traiter un patron de « gugus et de bouffon ». C’est sûr que la République toute entière tremblait sur ses bases face à ces dangereux gauchistes.

[*La police au service de l’Etat et du patronat*]

C’est sans doute également pour rétablir l’ordre républicain que la police est intervenue à Toulouse au Crea déloger de dangereux anarcho-autonomes qui, honte à eux, avaient réquisitionné un immeuble vide pour y loger des familles et mener, hors de tout cadre salarial, institutionnel et lucratif, un peu de travail social.

A quoi sert donc la police ? En soit à rien si ce n’est à réprimer les plus exclu-e-s d’entre nous, à nous inculquer la peur. La police participe d’un ensemble protéiforme de dispositifs de contrôle, de surveillance, de contraintes qui visent à tenter de tuer dans l’œuf les germes d’une remise en question d’un ordre politique, économique et social qu’on nous présente comme indépassable. Son rôle social est de nous maintenir dans cet état de conditionnement, par la peur, à l’obéissance à une autorité qui se sait par ailleurs illégitime. La police, et son corolaire la justice, s’assurent conjointement de traquer et de corriger les défauts d’une socialisation, par ailleurs assurée par la famille, l’école, etc., vouée à la soumission de toutes et de tous à un ordre social établi au service d’une petite classe dominante. Jamais la police n’est du côté des dominé-e-s, elle est faite par et pour s’assurer de la reproduction de la domination d’un ordre social hiérarchique et d’un ordre économique basés sur l’exploitation. La police n’est pas du côté des peuples : elle est l’arme de l’Etat et du patronat.

David (AL Paris Nord-Est)

[1Voir Alternative Libertaire n°208, été 2011

 
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