Alternatiba à Gonesse : Un festival contre le Grand Paris




Le collectif Alternatiba Île-de-France avait choisi le Triangle de Gonesse pour tenir sa première édition, en soutien à ce territoire emblématique de la lutte contre les réaménagements urbains en région parisienne. Un festival qui n’a fort malheureusement pas attiré le public francilien.

La défense du Triangle de Gonesse rassemble plusieurs enjeux : la lutte contre EuropaCity, le refus plus global d’un Grand Paris inégalitaire et imposé, et la défense de terres agricoles. Il ne restera en effet plus grand-chose des 1000 hectares de terres cultivées une fois construits le golf, le parc, et surtout EuropaCity, sa zone d’activité (250 hectares) et tous les transports qui vont avec : gare du Grand Paris Express (à laquelle Auchan a conditionné son projet), barreau ferré de Gonesse et sites pour bus à haut niveau de service. Une réserve de 400 hectares pour l’extension du Grand Roissy [1]
est hypocritement laissée aux agriculteurs et rebaptisée « carré vert ». Avec sa zone commerciale (500 enseignes) et ses nombreux parcs d’expositions, et de loisirs – dont la fumeuse piste de ski – , EuropaCity affirme la réussite d’Immochan, très compétitive filiale foncière d’Auchan qui bat là des records de démesure. Le projet prétend au succès touristique délirant de 26 millions de visiteurs par an, et bien sûr à une création massive d’emplois (11 000 directs et 5 900 indirects). S’il est si énorme, c’est pour mieux émerger dans un contexte de saturation de l’Île-de-France par les centres commerciaux existants (170) ou en projet (58) : il se construit non loin d’Aéroville, zone commerciale de ­Roissy qui a elle-même affaibli Parinor. Pourquoi cette concurrence effrénée ? Parce que la location d’espace aux enseignes rapporte, et que le secteur est juteux en termes de valorisation financière, il attire les investisseurs, si bien qu’un projet génère des capitaux avant même d’être ouvert. Une bulle immobilière à l’éclatement prévisible, d’autant plus que la vraie rentabilité, celle de l’économie réelle, commence à ne plus être au rendez-vous pour bien des sites. Quant aux emplois créés, on divisera le chiffre annoncé par deux ou trois compte tenu de ceux détruits ou simplement déplacés (centres des villes périphériques), et des mensonges des promoteurs. Pourtant, c’est avec cet argument qu’EuropaCity a le soutien de quasiment tous les pouvoirs publics : communautés de communes, établissement public d’aménagement de Plaine de France, conseil général du Val d’Oise... Pour l’instant, Immochan n’est propriétaire d’aucun terrain. Mais pour les infrastructures de transport, 180 hectares sont déjà expropriables car déclarés d’utilité publique. Évidemment, ni la protection des écosystèmes, ni la sobriété énergétique n’ont voix au chapitre. Par exemple la consommation d’eau du futur projet serait équivalente à celle d’une ville de 25 000 habitants.

Contre EuropaCity et son monde

Une manifestation dans les rues de Gonesse a occupé la première journée du festival, tandis que les ateliers du lendemain ont apporté un éclairage sur les enjeux climatiques, agricoles et surtout…politiques de l’aménagement en cours de Gonesse et de toute l’Île-de-France. Le festival aura peut-être trop recruté ses invité-es et son public parmi les militants, experts et élus locaux. Peu de réelles « alternatives » tenaient des stands, mais les associations (RSN, Utopia…) étaient là, et beaucoup de luttes (Notre-Dame-des-Landes, ferme des Bouillons ou des 1000 vaches). On aura même vu des réseaux de circuits courts et leurs agriculteurs bio venus défendre Gonesse contre EuropaCity mais sans négliger la critique du modèle agricole de la région. Bémol : une fréquentation décevante. Le prochain Alternatiba Idf se tiendra en septembre 2015, à trois mois de la conférence sur le climat (COP21) pour la préparer. Ce festival et les autres éditions, dont certaines sont infiltrées par l’extrême droite, doivent faire l’objet d’un article à venir.

Fanny (commission écologie)

[1Inscrite dans les contrats de développement territoriaux suite au Grand Paris depuis 2011.

 
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