Lutte de territoire

Amassada : le temps de l’occupation




Nous sommes dans une grande période de prédation des terres agricoles. et devant l’organisation des habitantes et habitants contre les grands projets énergétiques, l’État met en place une stratégie d’intimidation et de répression.

L’Amassada [1], occupation du site du projet de méga transformateur à Saint-Victor-et-Melvieu en Aveyron, est aujourd’hui confrontée à une opération étatique d’intimidation et de répression. L’objectif est de liquider cette lutte écologique. Dernier épisode en date : cinq occupant.es viennent de faire l’objet de garde à vue et d’interdiction de séjour.

Commençons par un rapide tour du clan des agresseurs. Il y a le commanditaire RTE, filiale d’EDF, qui compte relier toutes les installations d’énergies renouvelables de la région construites pour exporter de l’électricité. Aucun bénéfice énergétique n’est prévu pour le département ni même en terme d’emplois. Pour que le projet se fasse, Macron a dépêché en fin 2017 Catherine Sarlandie de la Robertie, une stratège de l’école militaire de Saint Cyr, au poste de préfète de l’Aveyron. [2] Son bras armé est la gendarmerie de Millau et son commandant fraîchement déployé qui a opéré au Center Parcs de Roybon et à Notre-Dame-des-Landes. Il est devenu une sorte de spécialiste des luttes de territoires avec pour mission la «  destruction  » de l’Amassada. [3]

Combat dans la campagne.

Ces gens peu recommandables multiplient les coups tordus pour imposer la construction de leur joujou. À commencer par la déclaration d’utilité publique (DUP) validée par la préfecture en juin passant outre la colère des habitantes et habitants.

Face à une opposition qui ne désarme pas, la pression policière a commencé à s’intensifier ces dernières semaines, notamment avec la mise en place d’une astreinte à rester loin des terrains convoités par RTE sous peine de 2 000 euros d’amende par jour sur site. Les gendarmes passent quotidiennement autour du site, et les occupantes et occupants se masquent pour ne pas être reconnu.es. Menaces, intimidations, amendes... Cela fait des semaines que la menace se précise, face à une campagne prête à se mobiliser.

L’Amassada, occupation du site du projet de méga transformateur à Saint-Victoret-Melvieu en Aveyron, est aujourd’hui confrontée à une opération étatique d’intimidation et de répression.

Le 7 février, à l’annonce de la venue d’une vingtaine de voitures de gendarmerie, nous fonçons sur le site. Il est 9 heures du matin. La brume recouvre tout le causse, nous sommes à quelques 600 mètres d’altitude, il fait 2°C et la bruine tombe… Nous retrou­vons des camarades sur le lieu, mais nous ne voyons rien, pas de flics, pas d’engins de chantier. Et pour cause  : cela a été une opération éclair, une rafle. Les flics sont venus, ont tranquillement cassé deux barricades dans la quiétude brumeuse, et ont attrapé cinq personnes qui dormaient là. Le café est encore tiède sur la table…

Dans la foulée nous décidons d’assiéger la gendarmerie de Saint-Affrique. Cela commence à être une habitude depuis Crassous [4], mais les copains et copines ne sont pas là  ! Ils et elles ont été disséminé.es en garde à vue dans des gendarmeries aux quatre coins de l’Aveyron. La mairie  ? il n’y a plus de service administratif, la sous-préfecture  ? En travaux  ! En fait ce qui tient à peu près lieu de démocratie représentative est vide. Personne… L’État s’est absenté pour cause de profit, mais son bras armé veille  !

Dans l’immédiat, l’urgence était donc de reconstruire des défenses et de réoccuper. C’est le lendemain que nous apprenons que les cinq occupantes et occupants vont passer devant le juge des libertés. Trois interdictions de séjour à Saint-Victor ont été prononcées et les deux autres sont expulsé.es d’Aveyron en attendant leur procès le 3 juillet. Le motif pour les embarquer a été «  dépôt d’ordures sur la voie publique  » (les barricades). Le motif pour le procès est l’occupation d’un bien appartenant à autrui.

Nous voyons là toute la stratégie de l’État cherchant à intimider et criminaliser le mouvement de contestation. Les pressions effectuées engagent des réponses qui poussent à se mettre dans la situation d’être répréhensibles. Et l’action démesurée des flics met en scène un spectacle qui vise à faire peur aux habitantes et habitants...

Ici, comme à Bure, l’État tente d’user la contestation en tapant au porte monnaie, en faisant durer, en criminalisant. Les machines ne viendront que lorsque la lutte aura capitulé, ils ont trop peur d’un «  accident  ». un flic assassinant un opposant ou le blessant gravement ferait mauvais genre pour la transition énergétique consensuelle et concertée. Mais la lutte ne cessera pas  !

Les perspectives actuelles.

RTE a obtenu tous les papiers officiels pour construire son transformateur. L’appétit des promoteurs s’aiguise. Nous sommes dans une grande période de prédation des terres agricoles. Et ce que dénonçait l’Amassada depuis des années se met en place. Tous les villages voient défiler des vendeurs d’éoliennes, de photovoltaïque pour les raccorder au transformateur et faire de l’export d’énergie renouvelable.

Le gros projet qui fait hurler depuis quelques semaines est un parc photovoltaïque de 400 hectares dans le sud du Larzac. [5] Les opposants à ce projet – pour une partie d’entre eux – étaient favorables au transformateur. Gageons qu’ils et elles comprennent enfin et que la lutte se renforcera.

Autre axe d’attaque  : derrière des noms chatoyants qui sentent le vert, se cachent des multinationales qui s’achètent des crédits carbones pour pérenniser leurs activités dégueulasses. Il faut construire un discours directement contre la transition énergétique que veulent les gouvernants, pour bâtir les fondement d’une écologie radicale et décentralisée. Les syndicats commencent à se saisir de cette question, comme Sud Éducation qui vient de voter le soutien de l’Amassada dans son combat. Continuons à élargir le front et faisons le procès de ce capitalisme prédateur.

Reinette noyée (AL Aveyron)

[1«  Éoliennes industrielles, une-ZAD en Aveyron  », dans Alternative libertaire de septembre 2018

 
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