Syrie-Kurdistan

Un communiste libertaire dans l’IFB #06 : Hommage à deux camarades, kurde et breton, venus de l’État français




« Kendal avait bien conscience du danger, comme nous toutes et tous, mais cela n’a pas atténué sa détermination. En nous quittant il m’a demandé : « Souhaite moi bonne chance ! », non pas pour les combats contre l’armée turque et les islamistes, mais pour réussir à passer sous les radars du régime syrien qui nous empêchait de nous rendre à Afrîn. »


Alternative libertaire reproduit les billets du blog Kurdistan-Autogestion-Révolution où, après Arthur Aberlin, engagé au sein des YPG, s’exprime à présent Damien Keller, engagé lui dans le Bataillon international de libération (IFB).

Au fil des semaines, il témoignera de la vie au sein de l’IFB, des débats qui s’y mènent et de l’évolution du processus révolutionnaire dans la Fédération démocratique de Syrie du Nord.


Canton de la Cizîrê, le 22 février

Nous avons appris il y a deux semaines la mort de notre camarade Özgür Seyit Karakoçan (Kemal Serhat Nicolas Akyol), tué par un bombardement de l’armée turque le 4 septembre 2017. Ce jeune Kurde de 21 ans avait quitté Paris pour défendre la liberté des peuples avant son 18e anniversaire pour défendre son peuple face aux fascistes de l’État turc dans les montagnes, avec la guérilla du PKK, puis à Sinjar ainsi qu’au Rojava contre les fascistes de Daech.

Notre camarade est tombé en martyr pour défendre la société démocratique en construction au Rojava, basée sur le féminisme, l’écologie et la démocratie directe.

Un hommage lui a été rendu aux locaux du CDKF à Paris :

Le 10 février 2018, notre camarade Kendal Breizh (Olivier) est tombé au combat suite à une frappe aérienne de l’aviation turque contre la position des YPG qu’il occupait sur le front de Cindirêsê. Un autre internationaliste, venu de l’État espagnol, Baran Galicia (Samuel), a aussi été tué lors du bombardement.

Venu de Bretagne [1], Kendal Breizh s’est engagé au sein des YPG et il a participé à la libération de la ville de Raqqa et à celle de la région de Deir ez-Zor au sein du bataillon YPG International.

Comme Kemal, il avait rejoint la révolution au Rojava car, avec le confédéralisme démocratique, elle défend une vision de la société autre que celle que nous pouvons connaître en Occident.

Olivier (Kendal) lors d’une manifestation en Bretagne.

Cette révolution s’oppose ainsi à ce contre quoi Kendal luttait en France : le capitalisme et le jacobinisme de l’État français. En effet, il militait aussi pour l’indépendance de la Bretagne, l’autodétermination de son peuple, soumis comme ceux du Pays basque, de la Corse ou encore de l’Alsace, au centralisme et à la bureaucratie de l’État français.

Les YPG l’avaient mis en avant pour leur vidéo sur les volontaires internationaux qui font le choix de braver la 2e armée de l’Otan et ses bombes pour continuer à défendre la révolution en cours au nord de la Syrie. C’est à cette occasion que j’ai eu le plaisir de le rencontrer, durant les trois jours d’intervalle entre mes deux tentatives de passage pour le canton d’Afrîn.

Il était heureux de pouvoir continuer à combattre les ennemis de la révolution, de combattre l’État turc et les fascistes qui composent son armée.

Kendal avait bien conscience du danger, comme nous toutes et tous, mais cela n’a pas atténué sa détermination. En nous quittant il m’a demandé : « Souhaite moi bonne chance ! », non pas pour les combats contre l’armée turque et les islamistes, mais pour réussir à passer sous les radars du régime syrien qui nous empêchait de nous rendre à Afrîn.

Nos camarades Kemal et Kendal ont tous les deux été victimes de la complicité de l’État français.

Complicité car celui-ci s’obstine à conserver le PKK sur la liste des organisations terroristes, et Emmanuel Macron a récemment qualifié les YPG-YPJ de « potentiels terroristes ». Cette condamnation vient du fait que l’État français préfère conserver de bonnes relations avec un partenaire commercial que défendre les peuples en lutte pour leur autodétermination.

Rien d’étonnant à cela, c’est aussi une tradition française de considérer comme terroristes les militantes et militants indépendantistes, même ceux et celles des colonies de l’intérieur de l’État français.

C’est pourquoi Kendal pariait sur sa mise en détention lors de son retour. Il n’en avait que faire, la lutte prime.

Kemal, dans les montagnes du Kurdistan.

Dans le même sens, l’État français conserve aujourd’hui une position dangereuse à propos de l’offensive de l’État turc sur le canton d’Afrîn, même si la victoire de celle-ci conduirait à une réimplantation des djihadistes dans la région.

Le combat de nos martyrs est le nôtre, nous le continuerons peu importe les États ou les forces fascistes contre nous.

Vive la Bretagne indépendante et socialiste !
Bevet Breizh dizalc’h ha sokialour !
Bijî Bretanya serbixwe û sosyalîst !

Vive l’autodétermination des peuples et l’internationalisme !
Bevet an emdidermenañ ar pobloù ha an etrebroadelouriezh !
Bijî xwediyarkirin gelan û navnetewetîyî !

Les martyrs ne meurent jamais !
Kenavo kamalad !
Şehîd namirin !

Damien Keller

[1Le groupe AL de Lorient lui a rendu un hommage particulier.

 
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