Écologie

Grands projets inutiles et imposés : De nouveaux réseaux s’enracinent




Coalitions, appels communs, actions décentralisées… Ces derniers mois, les luttes locales multiplient les initiatives partagées et les échanges à grande échelle. Un foisonnement riche en perspectives offrant de nouveaux espaces politiques pour les luttes écologiques.

Tout commence souvent juste là, à deux pas de chez soi. C’est la route qui éventrera la colline, un projet de golf géant, de retenue collinaire, de ZAC sur des terres agricoles... De « petits projets » si on les regarde de loin, mais qui s’additionnent dans une même logique de croissance par la destruction. Des projets locaux, que combattent des luttes locales, portées par une galaxie d’associations et de collectifs, mobilisés autant par d’autres visions du monde que d’autres visions du territoire habité. Car ces projets « d’aménagement », systématiquement présentés comme « dans l’intérêt des habitants », sont toujours une confiscation, une modification autoritaire des modes d’habiter pour convertir un lieu original en zone fonction de la machine à produire.

L’ancrage local de ces luttes fait leur force. Il pourrait aussi être une faiblesse si elles restaient circonscrites à des luttes de voisinage. Cependant ces luttes multiplient les rencontres et actions décentralisées, que ce soit les Journées contre la réintoxication du monde [1] visant à empêcher le redémarrage de la machine productiviste dans la foulée du confinement de 2020 et dont la 5e vague – Retour sur terres – s’est tenue le 26 juin dernier ou encore l’appel des Soulèvements de la Terre qui met en réseau les luttes contre l’agro-industrie (et au-delà) pour organiser des actions de masse sur des luttes cibles.

En inscrivant les luttes locales dans un combat global, ces coordinations permettent leur visibilisation, l’élargissement de leur audience et du nombre de celles et ceux qui peuvent s’y agréger.

UNE MOSAIQUE D’ANALYSES

Dans le même temps, par les rencontres qu’elles favorisent, la diversité des expériences se combine pour produire une analyse renouvelée du capitalisme dans son fonctionnement le plus précis. Chaque lutte, sur son terrain – projet routier, agro-industriel, touristique, énergétique, etc. – dissèque un pan du système et révèle le squelette qui sous-tend l’ensemble. Lors des coordinations, ces pans s’assemblent en un puzzle qui ne découle pas de théories pré-écrites mais d’une mosaïque d’analyses appuyées sur des experiences concrètes. Le système capitaliste productiviste se révèle alors autant dans sa globalité que dans sa mise en pratique réelle et immédiate. En parallèle, les luttes se nourrissent les unes des autres, sans chercher d’uniformisation. On fait ensemble en même temps que l’on continue à faire chez soi, à sa manière.

C’est le chemin que mène par exemple La déroute des routes, coalition de collectifs contre les projets routiers née au printemps dernier, et qui vient de lancer un appel à moratoire pour l’abandon des projets routiers. Autre exemple, ces 27 collectifs de la région Occitanie, qui ont publié en juin une tribune commune contre les « grands projets » menés par les élues locaux.

Grâce à ces multiples mises en réseau, les luttes locales renouvellent depuis la base discours et pratiques, et construisent l’opportunité de porter haut des revendications systémiques pensées à partir du terrain et de sa diversité.

Romain (UCL Montpellier)

[1Agir contre la réintoxication du monde, https://agir17.noblogs.org/ et sur les réseaux

 
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