Tunisiens en France : L’Etat français mène la contre-Révolution




Difficile pour les Tunisiens de trouver de l’aide en Europe. En france, derrière les discours de façade sur l’émancipation des peuples arabes, se cache une véritable traque des migrants par l’État et les élus.

Depuis avril, la Tunisie a connu une vague d’émigration passant par Lampedusa. Le gouvernement italien a accordé vingt mille documents permettant la libre circulation des migrants dans l’espace Schengen (voir AL 207). Rompant les accords en vigueur, la France tente alors de fermer ses frontières pour les Tunisien-ne-s, donnant un avant-goût de l’accueil qui les attend.

Du parc de La Villette à la rue Botzaris

Arrivés à Paris, quelques centaines de migrants tunisiens se sont regroupés au parc de La Villette. Bien qu’aidés par les associations en place, les migrants ont pu goûter aux premières techniques de harcèlement de la police qui a procédé à des arrestations lors des regroupements, notamment lors des distributions de repas. Une première solution d’hébergement est offerte par la CIP-IDF. Las, elle est elle-même sous le coup d’une mesure d’expulsion. Les migrantes et migrants décident alors d’investir un immeuble désaffecté, situé au 51 rue Simon Bolivar, appartenant à la ville de Paris, laquelle les fera expulser manu militari le 4 mai en proposant des hébergements complètement inappropriés, foyers dortoir utilisables seulement la nuit et dispersés sur plusieurs sites ce qui ferait éclater un groupe souhaitant avant tout rester ensemble. Ceci n’empêche pas la ville de célébrer le « printemps du Jasmin » place de l’hôtel de ville à grand renfort de stands sponsorisés par les magnats du tourisme tunisiens.

C’est donc un retour à la case départ pour les migrants qui vont occuper d’autres lieux : tout d’abord un gymnase, rue de la Fontaine-au-Roi. Puis, comme un symbole, un immeuble au 36 rue Botzaris et anciennement possédé par le RCD (Rassemblement Constitutionnel Démocratique, l’ancien parti de Ben Ali).

Que cache le centre culturel du 36 rue Botzaris ?

Officiellement, il s’agissait d’un centre culturel, plus vraisemblablement d’une antenne de surveillance des opposants tunisiens. Si la situation est lourde de symboles, elle n’en révèle pas moins les fractures de l’actuelle Tunisie. Le gouvernement de transition a demandé l’évacuation de l’immeuble. Bien que la Fédération des Tunisiens pour une Citoyenneté des deux Rives se soit montrée « assez déçue par cette demande », cela révèle qu’il reste encore à l’heure actuelle un certains nombre de personnages bien en place et soucieux de protéger les anciens secrets, l’immeuble stockant encore de nombreux documents. Une partie des migrant-e-s s’est retrouvée à devoir camper dans le parc des Buttes Chaumont ; ce qui facilita le travail de la police pour procéder à des arrestations et à des évacuations à plusieurs reprises. Le comble de l’hypocrisie est atteint le 30 juin avec l’inauguration par Bertrand Delanoë, dans le XIVe d’une place « Mohamed Bouazizi », du nom du jeune vendeur à la sauvette qui s’est immolé, déclenchant la révolution tunisienne. Après un vote unanime du Conseil de Paris, la classe politique se donne ainsi bonne figure devant les médias tout en humiliant les migrants en coulisse.

C’est dans ce climat pour le moins hostile, que les migrants et migrantes ont ainsi fait l’amère découverte des démocraties occidentales, de l’Europe forteresse et des doubles discours politiciens prompts à louer les volontés émancipatrices des peuples mais avant tout désireux d’éteindre le feu révolutionnaire.

Jean-Marc (PNE)

 
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