Edito : S’organiser pour lutter et pour vaincre




Les dockers européens nous ont donné une formidable leçon de lutte de classe. Alors que l’activité portuaire, comme toutes les autres activités économiques, subit depuis des décennies les assauts libéraux du patronat et de la Commission européenne, qui vise à déréglementer leur métier, ils viennent de remporter une victoire importante grâce à une lutte exemplaire.

Par leur grève et par leur mobilisation à Strasbourg, le 17 janvier dernier, ils ont réussi à faire reculer les eurodéputés qui devaient voter une directive permettant aux marins de décharger eux-mêmes leurs bateaux et signant à plus ou moins brève échéance la mise à mort du métier de docker. Résultat : le projet de directive est abandonné.
Cette mobilisation n’était pas un acte symbolique isolé.

Les grands ports européens ont été en bonne partie paralysés par la grève du 17 et les dockers ont montré leur détermination en affrontant un dispositif policier de choc qui protégeait les accès au Parlement européen. Les dockers et leurs organisations ont préparé et coordonné leur grève pendant plusieurs mois. Ils ne se sont également pas privés de communiquer à la presse leur volonté d’en découdre face à une politique qui avait pour objectif de mettre massivement au chômage et de liquider une profession haïe par la bourgeoisie pour ses traditions combatives.

Alors que ces derniers mois ont été marqués par la passivité quasi totale des confédérations syndicales et plus largement des organisations syndicales interprofessionnelles, cette victoire vient démontrer que la bourgeoisie triomphante n’est pas invincible. Espérons qu’elle donnera quelques mauvaises idées aux syndicats et aux altermondialistes qui manifesteront le 11 février contre la circulaire Bolkestein à Strasbourg. Cette directive doit également faire l’objet d’un vote le 14 février au Parlement européen. Ce même jour la Confédération européenne des syndicats (CES), qui mérite tout sauf le nom de syndicat, manifestera à Strasbourg pour essayer d’“ améliorer ” ce texte qui vise à aligner le droit du travail sur la législation des pays qui en sont les plus dépourvus. On mesure ainsi le chemin qui reste à parcourir pour construire un syndicalisme interprofessionnel et international qui soit un outil de lutte pour toutes les travailleuses et tous les travailleurs, en lieu et place d’une machine bureaucratique inutile et nuisible pour les exploité(e)s [1].

Directive antidockers, directive Bolkestein sur les services, contrat première embauche (CPE)... c’est la même logique qui inspire toutes ces mesures : liquidation du droit du travail, précarisation, esclavage.
Pas étonnant donc que ces mesures provoquent mécontentement, colère et révolte.

Le gouvernement est en train d’en prendre la mesure en essayant d’accélérer le calendrier parlementaire et de faire voter avant la fin du mois de février le texte de loi incluant le vote du CPE, ce sous-contrat de travail pour les jeunes qui vise à terme à abolir pour tou(te)s les salarié(e)s le contrat à durée indéterminée.

Alors que les lycéen(ne)s ont dû se battre seul(e)s face au pouvoir contre la loi Fillon, la lutte pour l’abrogation du CPE doit être celle de tout le salariat. L’enjeu est également d’en faire une lutte offensive contre la précarité, les licenciements et pour un salaire social qui doit bénéficier à tou(te)s les jeunes en formation.
L’expérience toute fraîche du mouvement lycéen peut être profitable pour des dizaines de milliers de jeunes qui y ont contribué afin de construire un mouvement revendicatif qui ait pour finalité la victoire de cette lutte et non un moyen de mettre en selle les candidats de gauche et d’extrême gauche pour l’élection présidentielle de 2007.

Alternative libertaire, le 24-01-2006

[1La CES et le patronat européen (UNICE) ont signé au printemps dernier une déclaration commune appelant patrons et travailleur(se)s à voter en faveur de la constitution européenne.

 
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