Sécurité énergétique : Oui, on peut sortir du nucléaire en cinq à dix ans




A l’automne 2008, le réseau Sortir du nucléaire publiait une étude présentant un programme de sortie de l’énergie atomique en cinq à dix ans : une bouffée d’oxygène entre deux nuages d’uranium !

Sortir du nucléaire à court terme, c’est possible : tel est le message de l’étude publiée par le réseau Sortir du nucléaire, contre des idées reçues imposées par l’État et l’industrie nucléaire, dont le groupe Areva est le navire amiral. Le scénario de sortie propose deux axes complémentaires : les économies d’énergie d’une part, la production d’électricité sans nucléaire d’autre part.

Économiser l’énergie

Il ne s’agit pas de produire, sans nucléaire, autant d’électricité qu’aujourd’hui, mais de produire à la hauteur de la consommation vraiment utile, alors qu’une part importante de l’électricité produite actuellement est gaspillée.

Tous les appareils (des ampoules à l’électroménager) ne consomment pas une quantité égale d’énergie pour le même service. On peut favoriser l’utilisation d’appareils plus économes – ampoules basse consommation – via des normes ou des taxes sur les plus gourmands. L’économie d’électricité passe aussi par un changement des pratiques. Le simple arrêt (au lieu de la mise en veille) après usage des appareils multimédias permettrait ainsi d’économiser la production d’un réacteur nucléaire par an !

Mais il y a plus radical : l’abolition pure et simple du chauffage électrique, véritable scandale énergétique puisqu’il représente un gaspillage équivalent à la production de 13 réacteurs ! La production de chaleur par d’autres moyens, mais surtout une meilleure isolation thermique des logements permettrait des économies énormes, qui profiteraient aussi bien au consommateur individuellement qu’à la société dans son ensemble.

Le réseau Sortir du nucléaire a évalué que la consommation d’électricité en France pourrait être réduite de 478,4 à 382,9 térawattheures (TWh) en cinq ans, puis à 367 en dix ans, soit une économie de 30 %. Cette seule réduction permettrait à elle seule la fermeture de 23 réacteurs nucléaires sur les 59 existants. Quant aux 36 restants, une montée en puissance des autres sources d’énergie compenserait leur production (voir graphique ci-contre).

Une électricité sans nucléaire

Inépuisables, peu onéreuses, sans danger et peu polluantes : il faut se tourner vers les énergies renouvelables pour produire de l’énergie. Si la France n’est guère en avance dans ce domaine, elle dispose de nombreuses possibilités : son potentiel éolien équivaut à 20 réacteurs. L’obstacle majeur n’est pas d’ordre technique, il réside dans l’absence de volonté politique : à l’heure actuelle le développement de l’éolien est abandonné aux aléas de l’initiative privée !

De même, pour l’énergie solaire, ce n’est pas le soleil qui manque. Ce qui manque, ce sont des usines de construction de panneaux solaires, et une réglementation favorisant leur implantation. La biomasse (combustion de bois et gaz issu de la décomposition de déchets organiques) permettrait quant à elle de produire jusqu’à 20 % des besoins en énergie, à condition d’en optimiser l’utilisation en diminuant les pertes au maximum. Une cheminée classique a un rendement énergétique médiocre, tandis qu’une chaudière bien étudiée fonctionnant à la biomasse se substitue aisément au chauffage électrique.

Autre avantage des énergies renouvelables : leur production est décentralisée, ce qui diminue les gaspillages dus au transport et crée des emplois locaux. C’est l’anti-modèle ultra-centralisé et opaque de l’industrie nucléaire.

Un autre point clé est la cogénération, consistant à utiliser la chaleur dégagée lors de la production d’électricité au lieu de la laisser se perdre, comme c’est le cas pour les réacteurs nucléaires. Le rendement d’un moteur en cogénération peut atteindre 90 %, contre 40 % pour un moteur classique. La cogénération permet ainsi de produire, à partir d’un même combustible, à la fois de l’électricité et du chauffage.
Au total, les énergies renouvelables pourraient contribuer à hauteur de 60 % de la production d’électricité dans dix ans, complétant les 40 % produits par le réseau hydroélectrique.

Énergies fossiles : un mal provisoire

Une sortie à court terme du nucléaire nécessiterait néanmoins de continuer à utiliser provisoirement les énergies fossiles, notamment le gaz, moins polluant que le charbon. C’est la contrepartie nécessaire d’une sortie rapide du nucléaire. Moindre mal, cette production se ferait dans des installations neuves conformes aux normes anti-pollution, et en utilisant au maximum la cogénération. Cette production permettrait de compléter la production permise par les énergies renouvelables.
L’étude du réseau Sortir du nucléaire, dont AL est membre, montre le chemin vers une sortie du nucléaire à court terme. L’exemple de l’Allemagne, qui a programmé la fermeture de sa dernière centrale pour 2020, montre qu’il n’y a pas de fatalité. Encore faudra-t-il pour cela obliger l’État français à se désolidariser de la toute-puissante industrie nucléaire !


Vincent (AL Paris-Sud)

 
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