Edito : à visage découvert




Aux États-Unis comme en France, le pouvoir policier, brutal et visible, est contesté : cette révolte est un indéniable progrès politique.
Mais il est aussi des formes de contrôle social plus subtiles et plus vicieuses, face auxquelles il ne faut pas baisser la garde.

Il est des formes d’exercice du pouvoir qui mutilent les chairs et frappent les esprits, et d’autres qui étouffent en silence.
Depuis l’assassinat de George Floyd en mai 2020, des milliers de manifestations ont eu lieu qui ont mis face-à-face d’un côté des activistes antiracistes pacifistes, d’autres plus offensifs, ou encore ces rangs de mères symboliquement armées pour défendre leur enfants, et de l’autre les contingents des forces de « l’ordre » et les milices suprémacistes blanches qui les relaient parfois, comme à Portland ; les figures sont de part et d’autre clairement identifiées.

Or, dès lors que le pouvoir qui opprime s’expose aussi librement dans son exercice, à visage découvert, il encourt le risque d’apparaître pour ce qu’il est, un coup de force permanent contre le droit qui lui sert d’habitude de caution ; il n’a fallu que quelques semaines pour que soit réclamée aux États-Unis la simple abolition de la police.

Mais il y a aussi des polices plus silencieuses, attentives à lire nos visages sans dévoiler le leur. La firme américaine Clearview développe depuis des années de puissants algorithmes de reconnaissance faciale, et elle n’a eu qu’à tendre le bras pour moissonner quelque 3 milliards de photos, la plupart publiquement accessibles sur les réseaux sociaux.

Vendu aux polices du monde entier comme aux entreprises et aux particuliers fortunées, le logiciel laisse entrevoir la possibilité de resserrer sans douleur les mailles du contrôle social.

Le pouvoir policier a plusieurs visages, et tous ne sont pas aussi reconnaissables.

UCL, 25 août 2020

 
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