Recueil : Guerre de mouvement et guerre de position de A. Gramsci, textes réunis par R Keucheyan




« Il faut empêcher ce cerveau de penser », déclarait le procureur fasciste qui condamna Antonio Gramsci en 1926. Ce que souligne ce recueil de textes présenté par Razmig Keucheyan, c’est la nouveauté de sa pensée des rapports de classe. Avec le fondateur du Parti communiste italien, sont formalisées des notions telles que l’hégémonie intellectuelle de la bourgeoisie, ou, comme le titre l’indique, le concept de guerre de position et guerre de mouvement. On retiendra cette formule : « Tous les hommes sont intellectuels ; mais tous les hommes ne remplissent pas dans la société la fonction d’intellectuels ». C’est peut être sur ce thème que les explications de Keucheyan sont les plus fournies, car Gramsci avait prévu l’importance de cette classe dans le fonctionnement des médias. C’est aussi pourquoi il fondera des revues - Ordine Novo – et des journaux, réalisant l’importance de l’éducation populaire. Pour Gramsci, une revue est un organisateur collectif. C’est sans doute pourquoi Keucheyan voit dans la revue Contretemps du défunt Daniel Bensaïd le moyen de faire émerger une intellectualité nouvelle.

Gramsci professe la con-frontation des idées avec l’ennemi, et ferraille sans cesse lui-même contre le penseur le plus reconnu dans l’Italie de son temps, Benedetto Croce. Des formules éclairantes : « Le modernisme n’a pas crée d’ordres religieux mais un parti politique : la démocratie chrétienne » (force politique centrale en Italie). Ou ce rappel : « le rapport entre la philosophie supérieure et le sens commun est assuré par la politique ». Et il développe en connaisseur de la religion catholique et de son histoire. « Nous sommes des prélats c’est-à-dire des politiques. »

Un chapitre important de ses Lettres de prisons s’attache au Prince de Machiavel. L’allégorie du Centaure machiavélien, figure de la nature bifide du pouvoir : « hégémonie cuirassée de coercition » qui n’est pas une forme figée, mais sait évoluer selon les circonstances. On doit à Gramsci de ne pas décoder l’Histoire de manière figée mais de la penser avec la sociologie, comme en mouvement.

Goby

• Plus d’informations sur le site de le blog des communistes libertaires du 93 :
http://libertaires93.over-blog.com/

• Antonio Gramsci, Guerre de mouvement et guerre de position, Textes choisis et présentés par Razmig Keucheyan, La Fabrique, 2012, 17 euros.

 
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