Dico anti-sécuritaire : Qu’est-ce qu’une loi d’exception ?




Chaque mois, un mot ou une expression passée au crible

Nous l’avons déjà vu, la France est depuis décembre 1996 en plan Vigipirate. Les événements de ces derniers jours à Toulouse et le retour (comme les hirondelles) du discours sécuritaire chez les candidats et les candidates à la présidentielle, laissent augurer d’un florilège de lois d’exceptions pour les prochains mois, qui que soit le vainqueur du cirque électoral de ce début d’année.

Déjà le président-candidat Sarkozy soigne sa droite en proposant de nouvelles lois pour soit disant lutter contre le terrorisme. Ainsi, il est prévu que dorénavant « La propagation et l’apologie d’idéologies extrémistes seront réprimées par un délit figurant dans le code pénal avec les moyens qui sont déjà ceux de la lutte antiterroriste ». Magnifique exemple de loi sécuritaire et d’exception à venir. Mais au fait, c’est quoi une loi d’exception ? Tout le monde en parle, certaines et certains les critiquent mais au final, au nom de la sécurité (dans les aéroports, ou dans des affaires de terrorisme par exemple) personne ou presque ne s’élève contre.

D’un point de vue strictement sémantique, une loi d’exception est une loi ayant une durée d’application limitée dans le temps (état de siège par exemple, qui est inscrit dans la constitution à l’article 36) et qui est due à une situation exceptionnelle (terrorisme, cataclysme nucléaire…). Pourtant depuis la fin du XIXe siècle ces lois soit disant exceptionnelles se sont multipliées pour stigmatiser tous ceux et toutes celles qui ne rentraient pas dans le moule de la société.

Parmi les premiers à être victimes de cette répression étatique déguisée, les anarchistes. En effet, après la Commune de Paris, la peur semée par les attentats anarchistes du début des années 1890, décida les tenants de l’ordre et de la morale à adopter les fameuses « lois scélérates » de 1893-1894. Sous couvert de protéger les « honnêtes citoyens » des méchants anarchistes, ces lois sont les premières depuis la répression de la Commune à réprimer l’action politique. Ces lois ne seront abrogées que le 23 décembre 1992, soit 99 ans après leur entrée en vigueur, ou l’art de faire durer du provisoire.

Aujourd’hui la multiplication des lois d’exception ou de nature soit-disant provisoire va de pair avec le développement des idées sécuritaires et des lois liberticides. Entre Vigipirate qui dure depuis 16 ans, les nouvelles règles en matière de transport aérien (passeports biométriques), ou les derniers propos de Sarkozy, les défenseurs et les défenseuses des libertés fondamentales ne savent plus où donner de la tête.

Pour ne revenir que sur la proposition du président de réprimer à priori ceux et celles qui auraient la mauvaise idée d’aller sur un site qui fait « la propagation et l’apologie des idées extrémistes », nous avons là l’exemple parfait de la loi d’exception (elle se situe hors du cadre juridique et constitutionnel en ce qu’elle réprime un délit avant qu’il ne soit commis). Si de telles lois étaient votées, toutes celles et tous ceux qui liraient des œuvres de Marx, Blanqui ou Pouget porraient alors être condamnés. On se rend ainsi compte que loin de lutter contre des risques terroristes, les lois d’exception sont bien là pour assurer le contrôle et la répression des déviants et déviantes à l’ordre capitaliste.

 
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