General Motors : un bilan mitigé




Petit retour sur les événements qui ont agité l’usine de fabrication de boîtes de vitesses de General Motors en Alsace. Mouvement bref mais massif, notamment suite à la vague de licenciements et de manifestations chez GM outre-Rhin en 2006.

En 2000, une première grève avait permis aux ouvriers de General Motors Strasbourg d’obtenir un accord garantissant les 35 heures sans flexibilité, dix-sept jours de RTT, ainsi qu’une substantielle augmentation.
Dès 2001, la direction de GM tentait de casser cet accord en voulant annualiser les 35 heures. En 2006, elle décide de réduire à douze jours les RTT, dont dix à la convenance de la direction, ce qui permettait de faire passer les jours de chômage technique ou de maladies sous forme de RTT. Le tout s’inscrivant dans une politique, mise en œuvre depuis longtemps, de compression de personnel (GM Strasbourg est passé de 2 100 salarié(e)s à 1 500) ainsi que d’accroissement des cadences de travail.

Dans de telles conditions, la CGT, soutenue par une centaine de salarié-e-s, effectue une ultime négociation avec la direction, qui se refuse à tout compromis. Suite à cet échec, le 11 janvier, la centaine d’ouvriers commence le débrayage des différents pôles d’activité. Spontanément les travailleuses et les travailleurs se mettent en grève, la CFDT et FO emboîtent le pas : on atteindra un chiffre record de 90 % de grévistes dans la production. Des assemblées générales sont mises en place, et, dès le début, le vote se fait à main levée.

Une délégation de négociation avec la direction est créée, celle-ci comprenant deux représentants de chaque syndicat (CGT, FO, CFDT), ainsi que huit ouvriers syndiqués ou pas, élus en assemblée générale. L’AG adopte les revendications : le maintien des acquis sociaux (RTT...), 100 euros net d’augmentation mensuelle et le paiement des jours de grève.

Durant la semaine de mobilisation, le patronat n’aura de cesse de jouer la politique du pourrissement, se refusant à toute proposition sérieuse et pratiquant l’intimidation et le chantage à l’emploi auprès des salarié-e-s. Puis, confrontée à la détermination des employés, la direction oblige ses cadres à usiner sur les chaînes de montage, et ceci, bien qu’ils ne soient en rien qualifiés ou habilités : du coup, une centaine d’entre eux rejoint les grévistes.

Une fin de grève confuse

Le 16 janvier, fatigués d’attendre un geste de leur hiérarchie, les ouvrières et les ouvriers proposent de bloquer le service des expéditions, nerf économique de GM. Malgré de nouvelles menaces sur le caractère illégal d’une telle action, l’AG décide unanimement d’agir. La direction de GM accentue la pression.

À ce moment se dessine l’élargissement du mouvement. La CGT organise devant l’usine GM, pour le 19 janvier, un rassemblement interprofessionnel de soutien (avec un écho particulier dans le secteur de la métallurgie, très développé dans ce quartier du port du Rhin). Mais, les manœuvres de la direction et de la CFDT vont faire échouer ce projet.

Craignant l’extension du mouvement, la direction profite du fait qu’un délégué syndical de la CFDT négocie en catimini la fin du mouvement avec le PDG de GM Europe. Présentant les propositions de la direction (75 euros d’augmentation et la suspension de la réforme des 35 heures) comme indépassables, il met une pression colossale sur les grévistes les plus démotivés, et obtient en AG la tenue d’un vote à bulletin secret portant sur la reconduction de la grève. Le scrutin s’effectue dans la désorganisation la plus totale : la direction effectue un rabattage massif auprès des non-grévistes.

La confusion permet à chacun de participer à ce scrutin sans contrôle, et même de voter plusieurs fois. Écœurés, les ouvrières et les ouvriers mobilisés de GM mettent un terme à la grève le 18 janvier. Il n’y aura même pas de dépouillement et le rassemblement interprofessionnel du lendemain est annulé.

Un bilan prometteur

Malgré une fin de grève difficile, les ouvriers de GM ont tout de même obtenu la préservation de leurs acquis ainsi qu’une augmentation de 75 euros mensuel.

Mais, au-delà de cette victoire mitigée, les salariés de General Motors ont acquis, selon leurs dires, la volonté de résister et de s’organiser démocratiquement contre les attaques du patronat. Au lendemain de l’arrêt du mouvement, nombre d’entre eux se déclaraient prêts à continuer le combat voire à l’étendre au reste des entreprises en difficulté en Alsace. La conception patronale de la démocratie n’est pas près de passer auprès des ouvriers… La démocratie a été l’œuvre des grévistes, organisés en assemblée générale, ne remettant pas leur sort entre les mains de quelques délégués syndicaux, et cela va laisser des marques. La section CGT, qui sort renforcée de ce mouvement, ne semble pas disposée à laisser passer une nouvelle réforme des 35 heures, à laquelle la direction reste attachée.

AL Alsace

 
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