Rapport Hetzel : l’ultime provo de Galouzeau




Il n’en a plus que pour quelques semaines avant le baisser de rideau définitif, et le CPE poursuit encore le Premier ministre ! Le rapport Hetzel est sans doute le dernier monstre né de la crise du printemps 2006. Une privatisation et une sélection accrues dans les universités : voilà ce qui ressort de ce rapport rédigé sur commande de Matignon par un parterre de technocrates déconnectés des réalités pédagogiques et sociales.

Il y a près d’un an, suite au mouvement contre la loi dite d’“ égalité des chances ” et le CPE, le gouvernement nomma une commission “ Université-Emploi ” afin de répondre aux “ inquiétudes ” des étudiantes et étudiants quant à leur avenir professionnel, à la précarité et au chômage. Le résultat est finalement tombé sous la forme d’un rapport remis au Premier ministre par Patrick Hetzel, président de la commission [1].Sans grande surprise, le rapport Hetzel a conclu de la crise du printemps dernier qu’il fallait s’orienter vers… une privatisation croissante des universités et une sélection sociale accrue !

Une commission patronale…

Le recteur de l’académie de Limoges et docteur en sciences de gestion, Patrick Hetzel, nommé à la tête de la commission, est également expert auprès d’entreprises. La commission était quant à elle composée, sur 14 membres, de 9 personnalités issues ou liées au milieu patronal (Danone, Axa, Holder, Veolia…) ou de think tanks patronaux (Cercle Vinci…).

Une des mesures phares du rapport Hetzel est d’instaurer une présélection pour les lycéennes et lycéens voulant s’inscrire à l’université. Comment ? Par la mise en place d’un entretien individuel pour décourager celles et ceux dont les notes ou les formations n’augurent pas d’un flamboyant parcours universitaire. Il s’agit de limiter le nombre d’étudiants dans un simple souci d’économie, et d’introduire de manière hypocrite un début de sélection à l’entrée de l’université.

Malgré le fait que plus de la moitié des étudiantes et des étudiants se salarient pour financer leurs études, le rapport estime que les étudiants ne sont pas suffisamment au fait des réalités du monde du travail…

…pour des propositions patronales

Pour y remédier il est proposé, entre autres, d’instaurer, en 3e année de licence, un stage obligatoire (il n’est fait mention d’aucune rémunération) ainsi qu’un module “projet professionnel personnalisé”, afin d’apprendre à “ se vendre ” sur le sacro-saint marché de l’emploi.

Enfin, le rapport remet sur le tapis la question de l’“autonomie financière” des universités… Derrière ce vocabulaire positif (“autonomie”), se cache un processus déjà en cours depuis plusieurs années. Il s’agit, assez prosaïquement, de réduire le budget public destiné aux universités, et de différencier les financements alloués aux universités en fonction de critères d’“efficacité” en termes de “professionnalisation” et de “compétitivité” de la recherche. Pour boucler leur budget, les universités seront donc amenées à augmenter les frais d’inscription mais surtout à faire appel à des financements patronaux. Or le client est roi ! Les universités devront adapter leur “offre de formation ” aux demandes du patronat local, ce qui n’augure rien de bon ni pour la recherche fondamentale ni pour les filières de sciences sociales et humaines.

Un an après le mouvement de la jeunesse, il reste un potentiel de mobilisation encore important chez les étudiantes et les étudiants. La question du débouché des études est un sujet extrêmement sensible chez la grande majorité de ceux-ci. Une des premières choses à faire est un travail de déconstruction idéologique : aujourd’hui le problème du chômage de masse n’est pas la conséquence d’une formation soi-disant “inadaptée” mais la conséquence de l’économie de marché. Pour l’expliquer, il faut organiser sur les université des AG/débats avec un maximum de monde (étudiants, professeurs, personnels) afin de pointer le caractère idéologique de ces réformes.

Organiser la riposte

La seconde chose à faire est de bloquer ce processus. Si ce n’est “que” un rapport, il propose des choses qui sont déjà en train d’être mises en place par les conseils d’administration universitaires à travers les projets d’établissement. Bloquer de manière durable ces conseils d’administration entraînerait sans aucun doute une crise dans laquelle nous pourrions faire avancer des revendications défendant une autre vision de l’enseignement supérieur.

Enfin il y aura nécessité à nous coordonner entre les universités car nous savons – et le mouvement du printemps l’a prouvé – que, rassemblés dans l’action et la grève, nous pouvons faire reculer n’importe quel gouvernement. Ensemble nous sommes plus nombreux et plus forts que cette poignée de technocrates qui nous imposent la précarité comme avenir.

Tristan (AL Rennes)

[1Le rapport est consultable ici

 
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