Ecologie

Lutte des sucs : éruption contre la déviation




En Haute-Loire, la «  lutte des sucs  » s’organise contre un grand projet de déviation de la RN88 entre les bourgs de Saint-Hostien et Le Pertuis. Le groupe UCL du Puy-en-Velay s’implique dans le combat contre ce projet destructeur et obsolète.

Le projet de déviation de la RN88, contre lequel se dresse la « lutte des sucs » (les sucs désignant des volcans endormis), ne date pas d’hier  : il a fait l’objet d’une déclaration d’utilité publique en 1997. Sont ainsi prévus 10 kilomètres de 2 x 2 voies, avec treize ouvrages d’art dont un viaduc de 300 mètres  ! En septembre 2020, la commission d’enquête publique a confirmé ce caractère d’intérêt public… Et bien que la route ne figure pas parmi ses compétences, la Région Auvergne-Rhône-Alpes, présidée par Laurent Wauquiez, a décidé de financer ce chantier à hauteur de 87 %, soit la modique somme de 197 millions d’euros. Ceci en s’appuyant sur des mensonges concernant les «  bénéfices  » réels. Le dossier d’enquête publique précise ainsi que le gain de temps estimé est d’une minute pour les camions et de deux à trois pour les voitures, mais les promoteurs continuent à annoncer un gain de dix à quinze minutes  !

Un déni de démocratie

Concernant la réduction des accidents, les données d’accidentologie communiquées par la direction interdépartementale des routes Massif central (DIRMC) sur les dix dernières années font état d’un seul accident mortel, non pas imputable à l’infrastructure mais à la consommation d‘alcool et de stupéfiants. Enfin, si les habitants des deux villages concernés, Le Pertuis et Saint-Hostien, ne subiraient effectivement plus le passage permanent des véhicules (ce qu’un simple contournement permettrait tout aussi bien et à moindre coût), ceux du second devront faire chaque jour un détour pour rejoindre une voie d’accès à la nationale. Le désenclavement est un vieux mythe.

Comme souvent, la consultation publique a été une mascarade de démocratie. Celle-ci a eu lieu… entre le 15 juillet et le 14 août 2020  ! Mais le rapporteur a considéré les résultats comme un référendum, accordant la même valeur à des arguments copiés-collés suite à un intense lobbying de la part de la chambre de commerce notamment, qu’à des argumentaires documentés de plusieurs dizaines de pages. Les délais judiciaires pour l’étude des différents recours déposés sont en outre incompatibles avec l’urgence dans laquelle ce chantier est d’ores et déjà mis en œuvre, pour des motivations purement électorales.

Celui-ci se fait d’ailleurs dans la violation des engagements nationaux et internationaux. Ce chantier est évidemment incompatible avec l’engagement «  zéro artificialisation des terres  » puisque ce sont 140 hectares de nature et de zones agricoles vitales qui vont être noyés sous le bitume. Il va également à l’encontre des objectifs de réduction d’émission de gaz à effet de serre. De plus, soixante-quinze espèces protégées vont purement et simplement disparaitre.

Face à cela, il y a un refus complet de prendre en compte les solutions alternatives. La construction de deux gares de croisement pour les TER Le Puy-en-Velay-Saint-Étienne permettrait par exemple de gagner jusqu’à un quart d’heure par trajet pour un coût infiniment moindre  : sept millions d’euros l’unité. Un contournement simple de chacun des deux villages serait déjà autrement plus économique et bien moins destructeur. De même que la mise en place de bus dans un département qui en manque cruellement. Ces propositions, pourtant tout à fait réalistes, n’ont été malgré la demande de l’Autorité environnementale, ni étudiées ni prises en compte, que ce soit par les élus ou le rapporteur de la consultation publique.

Le groupe UCL Le Puy-en-Velay est très impliqué dans cette lutte, en veillant à défendre la plus grande diversité des tactiques. Tous les recours juridiques doivent être tentés, même si nous devons pour l’instant constater que, comme avec beaucoup de procédures dites démocratiques, il est difficile de faire entendre raison par ces voies. Un véritable rapport de force doit donc être mis en place, dans la diversité et le respect des choix de chacun.

Si l’origine humaine du changement climatique n’est désormais plus contestable, il semble cependant plus judicieux de nommer l’ère géologique dans laquelle nous sommes entrés, capitalocène plutôt qu’anthropocène, car l’humanité toute entière n’est pas responsable de ces bouleversements telluriques, mais bien plutôt un certain système économique et social. Aussi, la sortie du capital fossile doit être admise par toutes les composantes du mouvement écologiste, tout comme le nécessaire abandon de ses infrastructures.

Aspirer à remplacer les irresponsables qui prétendent nous gouverner, c’est vouloir gérer les nuisances à leur place. Nous voulons, nous, les supprimer.

L’implication de l’UCL Le Puy

Des militantes de l’écologie politique ont choisi de porter ce débat sur le terrain des élections régionales, contre le candidat du capitalisme fossile, un potentat local qui impose sa politique destructrice et hostile à la vie, sur un territoire gangréné par le clientélisme.

Au-delà des réorientations budgétaires qui peuvent être significatives, tout compromis avec ce système semble pourtant illusoire. L’État est allié d’un néolibéralisme de plus en plus autoritaire, arc-bouté dans sa trajectoire et réfractaire à toute idée de bifurcation. D’autres militantes ont ensemencé les champs menacés, ce qui a certes une portée symbolique mais ne suffira pas à stopper les machines.
D’autres tactiques devront aussi être rapidement envisagées.

Nous devons en tout cas rester tous unis contre un ennemi commun, mobilisés par un même objectif. Il n’y a pas d’écologie si l’homme n’est pas solidaire de tout le reste. Comme le revendiquait une lutte qui a réussi il y a peu  : «  Nous ne défendons pas la nature, nous sommes la nature qui se défend.  »

Ernest London (UCL Le Puy-en-Velay)

  • L’UCL Le Puy-en-Velay appelle au rassemblement qui devrait avoir lieu
    le week-end des 22 et 23 mai.
 
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