Ecologie

Développement portuaire : Mépris démocratique et écologique au Havre




En Seine-Maritime, le groupe local de l’UCL édite une brochure trimestrielle d’information locale, Paroles Libertaires. Nous diffusons ce mois-ci un de leurs articles, dressant le bilan des conséquences néfastes pour l’environnement des travaux portuaires du Havre.

Alors que le secrétaire général de l’Élysée, Alexis Kolher, est mis en examen pour «  prise illégale d’intérêts  », ayant omis de déclarer ses liens familiaux avec la compagnie maritime Mediterranean shipping company (MSC), alors qu’il intervenait au nom de l’administration publique sur plusieurs dossiers la concernant, TIL-MSC annonçait en grande pompe un plan d’investissement de 700 millions d’euros sur six ans dans les deux nouveaux postes à conteneurs de Port 2000, au Havre. Édouard Philippe, présent lors de la cérémonie, a applaudi une «  annonce historique  » et les 1100 créations de postes promises, dont 900 dockers. A son tour, Christophe Béchut, ministre de la Transition écologique, a surenchéri sur l’opportunité de décarbonation du transport de marchandises que représentent de tels investissements. L’objectif commercial est de passer de 1,3 million de conteneurs par an à 4,5 millions pour le seul terminal de Normandie.

Si le transport maritime, par effet d’échelle, est bien le mode de transport le moins émetteur de carbone, il n’est nullement ici question de faire décroître le commerce global de marchandises ou de se passer du besoin de transport en visant une autonomie productive régionalisée. Bien au contraire, les nouveaux 700 mètres de quais et le triplement des prises électriques pour les conteneurs réfrigérés laisseront le champ libre aux aberrations environnementales consistant à importer des denrées très périssables depuis l’autre bout du monde et à «  capter des parts de marché  » sur les ports du nord de l’Europe. La «  sobriété  », depuis peu sur toutes les langues, semble bien vouloir dire un approfondissement de la concurrence sans aucune remise en cause des modes de production et du système capitaliste.

Investissement massif pour les navires de croisière

Au sein du port, ce n’est pas le seul projet de développement qui s’inscrit dans cette logique commerciale à marche forcée. Un investissement de 100 millions d’euros est mis sur la table pour une refonte totale de la pointe de Floride dédiée aux navires de croisière. Du côté des décideurs de la mairie, on nous assure que le projet comprend une promenade ouverte à la population, comme si cela constituait la préoccupation quotidienne des havrais de pouvoir déambuler dans un espace situé dans une zone industrielle !

Ce qui est bel et bien visé, c’est l’augmentation de 40 % de l’accueil pour atteindre 600 000 passagers par an et se servir du Havre comme d’une vitrine politique pour un maire aux ambitions dévorantes. Si une électrification des postes à quai est également prévue, permettant aux navires de stopper leurs moteurs le temps de l’escale, cela n’enlève rien à la consommation énergétique de ces villes de loisirs flottantes qui symbolisent désormais l’emblème du superflu dont il faudrait se débarrasser.

Les nouveaux 700 mètres de quais et le triplement des prises électriques pour les conteneurs réfrigérés laisseront le champ libre aux aberrations environnementales consistant à importer des denrées très périssables depuis l’autre bout du monde.
Photo : Alexandre Prevost

Mépris du droit du travail

Avancée comme la conséquence de la guerre en Ukraine, la tension sur l’approvisionnement en gaz de la France est avant tout une conséquence de l’inaction de la classe dirigeante face au problème de notre dépendance aux énergies fossiles. A l’approche de l’hiver, les autorités ont déjà averti les populations que des délestages, tant électriques que gaziers, étaient à prévoir. La saison hivernale 2023-2024 s’annonce pire encore. Cela a poussé le gouvernement à demander à Total d’installer un terminal méthanier flottant au sein du port du Havre. Celui-ci pourrait assurer 10 % de la consommation française.

Cependant, les associations écologistes et des organisations politiques s’opposent à une telle installation qui, par sa nature mobile, déroge au droit habituel concernant la sécurité, l’environnement et le travail dont elle relèverait si elle était fixe. Finies les 35 h, faisons place au régime applicable aux marins  : 48 h par semaine allant jusqu’à 91 h avec les heures supplémentaires. Autant dire que le facteur «  fatigue  » risque de faire monter indûment l’accidentologie, comme le montre d’ailleurs les statistiques de la marine marchande. Exit également la norme Seveso et les plans classiques de prévention des risques.

Tous ces grands travaux portuaires sont l’expression d’une énième confiscation du débat et des prises de décision par les classes dirigeantes. Votés par des conseils d’administration, tant publics que privés, ils renforcent l’idée que seuls des experts sont habilités à délibérer et renforcent la mainmise d’une petite minorité sur la société. A cela, il est grand temps d’opposer une démocratie directe des affaires publiques et l’autogestion des entreprises par les travailleurs.

UCL Le Havre

 
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