Politique

La France insoumise : Crise de succession démocratique




La guerre de succession fait rage à LFI. Autain, Ruffin, Corbière et les autres ont été écartés de la direction du mouvement au profit de Bompard. Les perdants hurlent au déni de démocratie alors que les gagnants appellent à l’union. Tout ça pour savoir qui sera le chef en 2027 ?

Rien ne va plus à La France Insoumise. Début décembre, après la nomination de la nouvelle direction du mouvement suite à la mise sur la touche d’Adrien Quatennens, les poids lourds historiques de LFI s’offusquent d’avoir été écartés de l’instance dirigeante. Clémentine Autain, Alexis Corbière, François Ruffin auraient voulu peser sur les futures orientations du mouvement. Or c’est un très proche de Jean-Luc Mélenchon, Manuel Bompard, qui dirigera la barque à la place du vieux tribun.

Selon les trois grognards, c’est un déni de démocratie qui se déroule sous leurs yeux. Leurs voix et leurs idées n’étant pas représentées à la direction du mouvement, alors celui-ci serait dépourvu d’organe de délibération et de représentation de la diversité d’opinion. Or la bataille ne se joue pas là.

L’autoritarisme de Mélenchon et la cooptation au sein du mouvement ne sont pas des surprises. Cela a déjà été dit et analysé. Ce qui est nouveau, c’est que des cadres souhaiteraient une plus grande parité sociale au sein du mouvement [1] et que la base locale ait plus de moyens et soit mieux écoutée. Ces voix discordantes à celle du vieux chef commencent à se faire entendre et réclament leur part du butin ainsi que le trône. Dès maintenant, se joue la question du ou de la future porte étendard de la «  gauche radicale  » voire de la Nupes pour les prochaines échéances électorales (les européennes de 2024, les municipales de 2026 et la présidentielle de 2027).

Or, d’après le nouveau patron des Insoumis, Manuel Bompard, tout est clair  : « Mon rôle, c’est d’assurer ­notre unité, c’est d’assurer le travail de développement de notre mouvement et certainement pas d’arbitrer en 2022 qui sera le prochain candidat à l’élection présidentielle de 2027. » [2]

Une machine pour créer un chef

Pour lui, il est nécessaire de regarder les victoires électorales plutôt que les noms sur les ronds de serviettes, alors même que tout est fait dans l’architecture de LFI pour faire obstacle au pluralisme et à la démocratie interne [3]. La FI est constituée de groupes d’action en local qui n’ont pas d’autre mission que d’obéir aux ordres venus d’en haut sans émettre aucune forme de réflexion. La FI se veut en pointe du mouvement social, proche du peuple, des syndicats mais elle n’est pas fichue de créer des instances dirigeantes représentatives de ses militants où chacun et chacune peut exprimer sa voix. Au lieu de cela, ce sont toujours les mêmes parlementaires qui se querellent.

Autain, Corbière et Ruffin appellent à l’union des Insoumis et de toute la gauche, si possible derrière eux. Mais Mélenchon n’est peut-être pas loin en embuscade. Se pense-t-il encore prêt pour 2027, en homme rassembleur  ? Ego personnel et autoritarisme s’opposent à la démocratie directe.

Julien (UCL Beaujolais)

[1Lire aussi l’interview d’Alexis Corbière  : « J’ai un radical désaccord avec la nouvelle direction de LFI », Le Monde, 16 décembre 2022.

[2Lire aussi « LFI  : Manuel Bompard balaie les critiques de Clémentine Autain et François Ruffin sur le manque de démocratie interne », Le Monde, 12 décembre 2022.

[3Lire aussi « L’architecture de la France insoumise est conçue pour faire obstacle à la démocratie interne », Rapport de Force, 25 août 2022.

 
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